mardi 18 novembre 2025

Un Journal de bord fictif ?

Davos
L’écrivaine Hélène Gaudy dans Un monde sans rivage, récit consacré à l’expédition polaire de 1897 de Salomon August Andrée, lequel avait échoué à rejoindre le pôle Nord et avait trouvé la mort avec ses deux compagnons, Hélène Gaudy fait référence à Donald Crowhurst, un navigateur qui au cours d’une course à la voile en solitaire autour du monde aurait sombré dans la folie et aurait rédigé un journal de bord totalement fictif ; à ce propos elle écrit ceci : « À la lecture du journal fictif de Crowhurst, on peut se demander dans quelle mesure celui d’Andrée – les repas qu’il raconte par le menu, l’observation des oiseaux et des roches, les plaisanteries entre camarades – n’est pas, lui aussi, destiné à faire exister une autre histoire, à laquelle ils se seraient laissés aller à croire. Pas seulement à se raccrocher à leur statut d’hommes civilisés mais à graver dans le marbre une réalité qui peu à peu dévie, avec un acharnement de plus en plus désespéré à mesure que se creuse l’écart entre ce qu’ils vivent et ce qui est raconté. Peut-être, dans cet écart impossible à mesurer, y a-t-il un autre récit dont nous ne saurons rien, jamais, que seule la relation précise, obsessionnelle, d’un quotidien de moins en moins réel parvient encore à adoucir, et le journal d’Andrée, peuplé de personnages de plus en plus détachés d’eux-mêmes, se lirait alors comme ce qu’est peut-être presque toujours un récit de survivant : un moyen d’échapper à l’insupportable, d’ordonner une vie qui s’affranchit chaque jour un peu plus de sa réalité. »
    
En 2024 j'ai mis en forme le journal de bord d'une expérience à laquelle je m'étais livré deux ans auparavant.  
En 2022 en effet je m'étais projeté dans un roman emblématique du 20e siècle : La Montagne magique de Thomas Mann. Comment avais-je procédé pour cette expérience de pensée de projection de mon propre fictionaute ?
Tout au long de l'année, à raison d’un texte par semaine alternant fiction pure, où je devenais le narrateur du roman que je relisais, et, making-of où j’exprimais mes doutes, mes interrogations et mes difficultés, je me suis lancé dans une sorte de "réécriture" décalée de certains chapitres du roman de Thomas Mann en m’y projetant comme un personnage supplémentaire.
Je me suis imaginé arrivant la veille de l’arrivée du personnage principal. 
Je me suis inséré dans le scénario, essayant de m’imposer dans l’histoire en tant que résident à part entière du sanatorium où l’action se déroule. Mais cela intéresse qui ?