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mardi 12 juillet 2022

Adam & Eve Fictionautes

Le langage que nous manipulons nous manipule, mais, plutôt que d'espérer nous émanciper de cette tutelle avec des technologies émergentes comme celles des réalités virtuelles et de l'intelligence artificielle, nous devrions pouvoir compter avec nos capacités innées à fabuler et à nous projeter mentalement dans des mondes fictionnels pour nous permettre un jour de mieux contrôler sa puissance démiurgique.

Progressivement des parentés pourraient se faire jour entre le cyberespace et l'espace intérieur des lectrices et des lecteurs de fictions littéraires, là où ils visualisent mentalement les mondes fictionnels d
e leurs lectures (un champ que j'explore dans un fil de textes en accès libre ici).
 
L'objectif est de dépasser le mur théorique des métalepses narratives - "procédé par lequel un ou des éléments d'un récit franchissent le seuil qui les sépare d'un autre qu'il contient ou qui le contient..." Wikipédia -, fréquentes à l'intérieur des mondes imaginaires, qui pourraient être aux sources du langage, et de nous permettre un jour l'exploration de territoires hors du champ de nos sens physiques.
 

Dans la pensée humaine le réflexe narratif serait antérieur au langage.
Profitons-en !

   📌  Au cours de cette décennie des synergies vont se renforcer entre des explorateurs solitaires des mondes fictionnels (Cf. mon concept de fictionaute, potentiellement profondément impactant pour nos vies quotidiennes et numériques), et, sur le modèle des Grandes découvertes des 15e et 16e siècles, des expéditions qui seront lancées vers des territoires imaginaires.
Leur objectif sera d'explorer ces terres virtuelles et d'entrer en relation avec des formes d'intelligences (trans)fictionnelles, comme nous entrerions en relation avec des intelligences extraterrestres.
Peut-être même ces contacts remplaceront-ils, se substitueront-ils dans l'histoire de notre espèce animale à ceux que nous n'aurons probablement pas avec des extraterrestres.
Les premières étapes passent par la forge d'outils cognitifs adaptés et par la mise au point de protocoles rigoureux d'expériences en pensée (en 2022 j'en expérimente une ici...).
Les étapes préalables sont :
- Une analyse critique approfondie et un renouvellement du lexique des approches de littérature comparée,
- Une redéfinition des termes des champs de recherche et des objectifs à atteindre,
- La constitution de véritables équipes d'exploratrices et d'explorateurs avec des ordres de missions bien précis.
L'aventure vous intéresse ?

lundi 8 février 2021

Les Gens de Légendes - Notes sur les Intelligences Fictionnelles

Notes sur les Intelligences Fictionnelles
Cette appellation, Les gens de légendes, pourrait-elle être une définition des marionnettistes que nous appelons généralement des noms substitués de "destin", "hasard", "chance" ou bien "malchance" ? 

Depuis l'aube de l'humanité le potentiel démiurgique du langage dirige nos pensées, façonne notre perception du monde et y influence notre conduite.
Or, la cristallisation de certains effets de langage génère de véritables entités actives que, comme le faisaient les sociétés polythéistes, nous devrions reconnaitre comme des intelligences fictionnelles à part entière. Ces créatures vivantes non anthropomorphiques font tourner les manèges sur lesquels nous sommes ! Il suffirait de relire Homère pour en prendre conscience.

"Le(s) gen(s) de légendes", ou "légende de légendes" car nous serions dans le programme. Alors qu'à longueur de journées nous déblatérons sur les algorithmes nous ne semblons pas vouloir comprendre que tout texte code. Potentiellement les fictions littéraires, au premier rang desquelles s'imposent les mythes de la création, sont de puissantes matrices conceptuelles qui informent notre environnement physique par le biais des illusions cognitives qu'elles entretiennent. 
Aujourd'hui le boucan médiatique autour des Intelligences Artificielles risque fort de masquer une fois de plus les activités réelles de ces Intelligences Fictionnelles. Pourtant, des personnages de fiction aux personnes fictives, diverses manifestations révèlent leur présence furtive parmi nous.

Ces réflexions sur les Intelligences Fictionnelles recoupent en fait les thèmes de plusieurs de mes conférences qui sont présentées dans le catalogue 2021. En présentiel ou en visioconférences il est toujours possible de concevoir sur mesure un échange adapté à votre contexte. C'est l'urgence d'aborder de front un tel sujet qui doit primer !

samedi 12 septembre 2020

Une puissance démiurgique dans des textes de fiction

Est-ce possible que des textes de fictions littéraires renferment une certaine puissance démiurgique ? 

A la croisée d'une réflexion sur la performativité et les effets de réel du langage sur nos mouvements de pensée, et, d'une approche de la théorie kabbalistique du langage, la question en tout cas se pose.
Et je me propose d'essayer d'y répondre avec vous. Aussi, si vous souhaitez en parler avec moi n'hésitez pas à me contacter pour un rendez-vous sur Skype [contact : lorenzo.soccavo] en fonction de vos disponibilités. Nous pourrons déterminer ensemble l'angle d'approche le plus pertinent pour aborder ce sujet par rapport à votre contexte, à votre domaine d'intervention et à vos publics.

Conference exclusive de Lorenzo Soccavo
Fiche II extraite du catalogue de conférences téléchargeable en suivant ce lien ...

jeudi 13 février 2020

Des virus dans des textes de fictions

La loi de Zipf montre que la fréquence d’utilisation d’un mot dans un texte est inversement proportionnelle à son rang, dans Ulysse de Joyce le mot le plus fréquent revient 8 000 fois, le dixième 800 fois, etc., cette constatation pourrait nous mettre sur la voie de formes latentes de vie contenues dans les textes.
  
Qu'il y ait un virus dans un programme informatique nous le concevons. Qu'il y en ait dans d'autres formes de textes, et particulièrement dans les textes littéraires, nous n'y pensons généralement pas alors que nous savons que le langage conditionne notre manière de percevoir le monde, qu'il ne se réduit pas à son apparence de simple moyen de communication entre les humains, et que l'écrit potentialise une énergie et un pouvoir symbolique indéniables.
 
Toute personne passionnée par la lecture de romans ressent intimement en elle l'agitation animiste des personnages et des paysages décrits.
La Novlangue inventée par George Orwell dans la fiction, ou bien dans la réalité les travaux du philologue Victor Klemperer qui montre comment l'horreur nazie fut rendue possible par une contamination du langage, attestent d'un façonnage de la perception de notre environnement matériel par la transmission de données virales immatérielles.
Cette poussée démiurgique du langage est depuis longtemps étudiée par les kabbalistes, comme l'examine avec clarté le philosophe contemporain spécialiste de la mystique juive Gershom Sholem, dans un petit essai paru récemment : Le Nom de Dieu et la théorie kabbalistique du langage.
Cette intuition est exprimée par des artistes. 
Dans Du théâtre clandestin au théâtre de la mort le metteur en scène polonais Tadeusz Kantor écrit :  "Le principe selon lequel les idées sont déterminées par les conditions historiques et sociales n'exclut pas le fait qu'elles aient également une force autonome de même niveau pour façonner de nouvelles conditions historiques et sociales et, par conséquent, de donner naissance à de nouvelles idées, ce qui indiquerait qu'elles possèdent également leur propre circuit autonome de développement." .

Comme l'écrivait George Steiner dans son essai Réelles présences. Les arts du sens : « la grammaire vit et engendre de nouveaux mondes parce qu'existe le pari sur l'existence de Dieu. ». Assertion que nous pourrions inverser ainsi : parce que nous faisons le pari de l'existence de Dieu notre grammaire vit et engendre de nouveaux mondes.
Alors : pourrait-on considérer certains textes littéraires comme des algorithmes ?
J'ai beaucoup de réflexions et quelques éléments de réponses à ce propos.
Contactez-moi si le sujet vous intéresse pour un article détaillé ou une conférence...
 

samedi 10 décembre 2016

Faits et Fiction : une impossible frontière

De l'argent liquide
Si nous voulons absolument qu'il y ait une nette distinction tracée entre les faits et la fiction, il nous faudrait commencer alors par dé-fictionnaliser les faits, alors que dans leur très grande majorité ils ne sont ni plus ni moins que des manifestations d'un consensus culturel consenti et renforcé par l'usage et l'habitude que nous en avons : des inventions humaines.
La nation, la valeur de l'argent, la séparation entre préhistoire et histoire, les noms de toutes choses, quoi d'autre que des inventions de notre espèce animale : des fictions ?

lundi 7 novembre 2016

Une forme particulière de narration



Si nous définissons le réel comme une lecture partagée du présent, les récits qui nous en sont proposés n'entretiennent notre attention et notre adhésion qu'en nous offrant des tranches factices de son making-of. 
Si le réel n'est qu'une forme particulière de narration de l'instant, à laquelle, en tant que personnages ou qu'acteurs nous sommes bien obligés d'adhérer, alors la question de son avenir, de l'avenir du réel, relève bien de la prospective et de la futurologie de la lecture.
Qu'en pensez-vous ?

mardi 24 mai 2016

Vers une bio-informatique au service des fictionautes

Le titre peut-être un peu énigmatique de ce post cherche en fait à exprimer le message subliminal que j'ai essayé de faire passer le samedi 21 mai 2016 lors de mon intervention intitulée " LE LIVRE : ESPACE INTERIEUR OU INTERMONDE ? " au cours de la séance consacrée à La Symbolique du Livre, dans le cadre du séminaire Cultures Numériques à la Bibliothèque Interuniversitaire de la Sorbonne.
Le texte complet de mon intervention est en ligne sur le site du carnet de recherche du séminaire sur Hypothèses.org en cliquant sur ce lien...

lundi 9 mai 2016

Pour un empowerment des lecteurs de fictions

Deux essais parus récemment : Fait et Fiction - Pour une frontière par Françoise Lavocat, professeure de littérature comparée à l'Université Paris 3 Sorbonne nouvelle et membre de l’institut Universitaire de France (à écouter sur France Culture), et Les qualités de l'homme - Manifeste, par la philosophe Valérie Charolles (lire sa tribune : Comment construire un espace entre le réel et la fiction ? sur Viabooks), montrent combien la question du rapport au réel est un sujet de plus en plus sensible.
 
Dans la foulée de Constellations - Des mondes fictionnels dans l'imaginaire contemporain par Anne Besson, paru en mai 2015 aux éditions du CNRS, ces deux nouveaux essais nous incitent à une véritable prise de conscience, celle des fictions dont nous sommes en permanence les propres générateurs : si une porte (celle, par exemple, entre le "réel" et le "fictif") a toujours deux côtés, peut-être devrions-nous au cours de ce siècle apprendre à ne plus nous situer alternativement d'un côté puis de l'autre, ou des deux côtés à la fois, mais, à nous tenir en permanence sur le seuil d'une porte qui n'aurait... qu'un seul côté. 
 
Mais s'il y a bien, d'une part, ce que j'appelle un "réflexe narratif" de notre espèce, duquel il faudrait démêler apophénie et synchronicité, il y a également je pense, d'autre part, un versant orwellien ("1984") qui nécessiterait de toute urgence de travailler énergiquement à la capacitation (empowerment) des lecteurs (décodeurs) que nous sommes tous forcément, comme tout organisme vivant en milieu complexe. Qu'en pensez-vous ? Seriez-vous prêt(e)s à accompagner un tel travail ?

lundi 21 mars 2016

Vers des lecteurs mutants à Vidéoformes 2016

J'ai eu le plaisir de participer le samedi 19 mars 2016 dans le cadre du festival Vidéoformes 2016 de Clermont-Ferrand à la table ronde : TRANSITION NUMERIQUE - LES MUTANTS, animée par Elise Aspord, et en compagnie de Virginie Pringuet et Hortense Gauthier (détails en suivant ce lien).

 
La diapo ci-dessous synthétise le principal de l'aspect théorique de mon intervention, qui a surtout consisté à expliciter mon commentaire en vis-à-vis de la peinture d'Antonello de Messine, avant de présenter sommairement deux de mes travaux plus pratiques, avec mon "book in progress" sur la plateforme Wattpad : Le Voyage Intérieur du Lecteur, et mes prototypes de librairie, de bibliothèque universitaire et de "café littéraire" et expériences théâtrales (avec le Théâtre de l'Adret) sur la plate-forme web 3D immersive EVER (Environnement Virtuel pour l'Enseignement et la Recherche) de l'université de Strasbourg. Tout cela dans la perspective interrogative : Vers des lecteurs mutants ?
 
La lecture immersive est avant tout une expérience humaine
 
 N.B. : Photos Vidéoformes 2016 par Gabriel V. Soucheyre.

vendredi 4 mars 2016

La Transition Numérique - Les Mutants

Dans le cadre du Festival Vidéoformes 2016 j'aurai le plaisir de participer le samedi 19 mars à 10H00 à la Maison de la Culture de Clermont-Ferrand à la table ronde animée par Elise Aspord (docteur en Histoire de l’art, thèse "Art et Intelligence, vie artificielle et robotique", Paris X) et en compagnie de Virginie Pringuet (programmatrice/curator dans le champ des arts médiatiques), et de Hortense Gauthier (créatrice poétique intermédia, avec Philippe Boisnard), autour du thème : Transmedia / crossmedia : une évolution des paradigmes de la représentation des contenus et de leur diffusion.
Vous serez les bienvenus !

dimanche 28 février 2016

Un lundi noir sur la Lune avec Le Voyage Intérieur du Lecteur Chapitre Dix

Le dixième chapitre de l'essai Le Voyage Intérieur du Lecteur est en ligne ici, consultable gratuitement avec la possibilité de laisser vos commentaires, critiques et suggestions. Dans ces quelques nouvelles pages nous parlons des habitants de la Lune et de Mars, de Jung et de thérapies narratives, et nous commençons à y voir plus clair sur où nous allons. Vous suivez ?

mercredi 10 février 2016

Les cités mentales

Les cités mentales sont extraites du projet d'écriture "Le Voyage intérieur du lecteur" sur Wattpad. La vidéo avec mon avatar a été réalisée sur la plateforme opensimulator EVER (Environnement Virtuel pour l'Enseignement et la Recherche) de l'université de Strasbourg. Si vous voulez vraiment comprendre ce dont il s'agit, il vous faut aller voir sur les plateformes Wattpad et EVER. Se préparer au monde qui émerge demande des efforts.




"Aujourd'hui, des cités numériques, qui n'ont pas d'existence physique dans le monde dit réel, celui perceptible par nos cinq sens physiques sans le truchement d'un appareil de décodage, des cités numériques émettent à destination du futur. De ces cités parfois qualifiées, faute de mieux, de "virtuelles", des masses de données sont diffusées par des canaux multiples et de jours en jours de plus en plus nombreux.
Ces cités sont déterritorialisées et dématérialisées. Ce ne sont pas véritablement des cités dans le sens architectural ou administratif. Ce sont ce que nous pourrions peut-être appeler des "cités mentales", sur le modèle des cités-Etats. Je ne parle pas ici de mondes imaginaires issus de l'esprit d'auteurs ou d'artistes. Non. Je fais référence, par exemple, aux entités satellitaires du GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft), mais aussi aux industries planétaires de divertissement, mais également à des groupuscules discrets qui avec insistance collectent et propagent des informations spécifiques sur des sujets qu'ils considèrent sensibles. Les entreprises mondialisées par lesquelles les GAFAM se matérialisent ont bien évidemment une existence physique, mais, je crois, ce qui émane d'elles serait de l'ordre de "cités-(états)-mentales".
Si nous sommes attentivement à l'écoute du monde réel, nous percevons que des données sont émises précisément depuis de tels non-lieux, que je propose d'imaginer comme des cités-mentales. Ces informations altèrent progressivement notre rapport à la réalité dont, en plus, il n'est pas impossible qu'elles déterminent probablement le devenir. Notre rapport à la réalité change. La lecture, vécue comme une expérience de pensée à part entière, nous permet de modifier notre perception consciente du réel en nous permettant de multiplier les points de vue, les contextes et les conditions d'observation.
Si je ne parle pas ici de mondes imaginaires issus de l'esprit d'auteurs ou d'artistes, je pense par contre que des entités fictives, bien issues elles de l'esprit d'auteurs et de lecteurs, pourront un jour explorer ces espaces mentaux, infiltrer ces nouvelles cités-Etats, et un jour peut-être, y être nos doubles numériques. Dans un monde où nous sommes lus, où nous sommes tous lecteurs et, au moins potentiellement, tous auteurs, lire est non seulement naturel, mais il devient de plus en plus vital de savoir lire derrière les messages apparents. De plus en plus, être en capacité réelle de lire sera être en mesure de résister et de rester libre, au moins d'esprit." (Texte extrait de : Le voyage intérieur du lecteur).

dimanche 25 octobre 2015

Réflexions à la lecture de MAGIE ET TECHNOLOGIE de Manuela de Barros

Une intéressante réflexion sur une centaine de pages de Manuela de Barros sur les liens entre magie et technologie (comme arts de l'illusion et de la manipulation dirais-je) vient de paraître aux Editions Supernova.
Cet essai trouve sa place dans la bibliographie de la prospective du livre et de la lecture, en ce sens qu'il met en perspective la pensée et le discours des technosciences, et ce faisant par un effet de miroir, de réflexion, éclaire l'avenir en éclairant le passé.
Sur son étagère virtuelle cohabitent quelques livres comme, par exemple, La sorcière de Jules Michelet (évoqué par l'auteure), ou d'autres auxquels j'ai repensé, comme Les enchanteurs de Romain Gary, ou encore La logique de l'usage de Jacques Perriault. Rien que cela montre la diversité des approches à laquelle je suis si sensible, la subjectivité des points de vues et leurs noces alchimiques dans une multidisciplinarité féconde.
  
Dans ce premier volet d'une trilogie en gestation, Manuela de Barros s'attarde notamment sur la pensée et les travaux de Donna Haraway, pour laquelle: "La frontière qui sépare la science-fiction de la réalité sociale n'est qu'illusion d'optique".
Voilà de formulé avec clarté l'un des axes d'investigation de ma propre activité de chercheur en prospective de la lecture : "La réalité est faite de représentations, résume Manuela de Barros, comme dans un roman de K. Dick notre monde serait construit sur un mode hallucinatoire. C'est le discours sur le monde qui lui donne forme et le rend appréhendable, par exemple avec les mythes et la religion."
 
"Les "marginaux" de la Silicon Valley ont réussi par leur puissance monétaire et leur capacité à créer un monde imaginaire dans lequel la frontière entre le fictif, le réalisé et le réalisable est floue, à faire de l'ombre au monde réel...", nous met en garde l'auteur.
Mon travail de veille me confronte au quotidien à ce nouveau, à cet autre récit du monde en train de s'écrire et dans lequel nous ne savons pas exactement quels seront nos rôles et s'ils sont réellement (sic) enviables ? 
Ce phénomène d'écriture d'un nouveau récit a été tout récemment très bien documenté par Anne Besson dans son volumineux essai paru en avril 2015 aux éditions du CNRS : Constellations - Des mondes fictionnels dans l'imaginaire contemporain.
" [...] les technologies existent parce que quelqu'un y a cru assez pour créer une nouvelle réalité. Et j'ai même tendance à penser, ajoute Manuela de Barros, qu'il y a un processus encore à identifier totalement, par lequel on crée les conditions matérielles de réalisation d'objets et d'opérations imaginaires.". D'où, plus que la parallèle, l'inscription des technologies dans les stratégies de la magie pratique
 
La prospective de la lecture en fer de lance  
 
La Grande convergence, j'ai déjà avancé plusieurs fois cette proposition, a à voir avec la lecture. Avec la génomique le corps vivant lui-même est considéré comme un code à décrypter. La bio-ingénierie forme une génération de bibliothécaires dont nous peinons à imaginer de quels genres de livres ils seront un jour les gardiens et les médiateurs.
 
Ce dont nous devrions prendre conscience, c'est que les mutations en gestation dans le secteur, apparemment innocent, du livre, dépassent de beaucoup les simples et habituelles questions matérielles liées aux supports et aux dispositifs. Probablement même qu'à l'échéance de la fin de ce siècle la problématique ne se posera plus en ces termes (c'est-à-dire dans ceux où, malheureusement, la majorité d'entre nous la pose aujourd'hui), et, sans que cela n'ait plus alors aucune espèce d'importance, et qu'elle n'aura pas pour autant, cette problématique, été résolue par rapport à une opposition (ni même à une complémentarité) papier / écran, imprimé / numérique. Car ce qui se prépare actuellement est en fait bien plus de l'ordre de l'émergence, d'une part, de nouvelles formes de narration, et, d'autre part, d'univers transfictionnels, avec des moyens d'accès et de locomotion dans le fictionnel que nous commençons tout juste à pouvoir deviner (casques de réalité virtuelle, lunettes et/ou lentilles connectées, intelligences artificielles et transferts de mémoires, etc.).
 
Nous assistons actuellement au divorce de la lecture d'avec les pouvoirs de l'écrit (Cf. pour mémoire : Histoire et pouvoirs de l'écrit, de Henri-Jean Martin).
Des questions essentielles se posent sans cesse à nous.
Qui écrit, qui contrôle les (nouvelles notamment) procédures narratives ?
A quoi, la fiction, en tant que puissance intégratrice, nous intègre-t-elle ?
Serait-ce dans le cœur de la fiction que pourraient se réaliser des expériences de pensées à la frontière des œuvres de Borges et de la mécanique quantique ? (Après la fiction romanesque comme laboratoire des cas de conscience (Frédérique Leichter-Flack), le roman comme laboratoire de physique quantique ?)
Et si Hermann Hesse avait été visionnaire de cela dans son fabuleux Le jeu des perles de verre ?
 
Voilà mes réflexions à la lecture de Magie et technologie, un essai accessible à partir du site des éditions Supernova, et dont je vous recommande la lecture (Vidéo de présentation par l'auteure).

lundi 17 août 2015

Lire au 21e siècle et au-delà

Lire ce n'est pas seulement prononcer à haute voix ou mentalement des mots écrits. C'est aussi, c'est d'abord (car l'écriture du langage oral ne date que de 5400 ans au plus), pouvoir accéder au sens d'un texte et/ou d'un contexte.
 
Progressivement l'acquisition de l'écriture nous a fait oublier que lire était aussi lire, non pas uniquement ce que notre espèce écrit, mais aussi tout ce qui nous environne : décoder et documenter, tant notre environnement extérieur que notre vie intérieure.
La lecture est l'objet d'un apprentissage. Mais notre propos est ici d'envisager la lecture elle-même comme objet d'étude en prospective.
 
Les historiens et les linguistes se sont d'abord accaparés cet objet. Aujourd'hui la lecture est de plus en plus un objet d'étude pour les neurosciences cognitives.
Les historiens abordent surtout l'histoire du livre, et souvent par le petit bout de la lorgnette, avec par exemple des sujets comme celui-ci (imaginé pour ne viser personne) : "Fonds de la bibliothèque d'un notaire de province au XVIIIe siècle - L'Etude de Me Hilaire Pécuchet à Barneville-Carteret, Basse-Normandie - 1705-1720" (N'étant pas historien je ne garantis pas la plausibilité de la chose.). Je vous recommanderais plutôt "Une histoire de la lecture" d'Alberto Manguel. 
Les linguistes abusent d'un jargon qui tient éloigné locuteurs et lecteurs.
Les neurobiologistes découvrent progressivement les fondements programmatiques du langage et de la lecture (voir par exemple les cours au Collège de France de Stanislas Dehaene sur les mécanismes cérébraux de la lecture).
 
Une nouvelle méthode de lecture...
 
Dans la perspective qui est la nôtre, telle qu'exprimée précédemment dans un billet du mois de juillet : Cette Chose derrière le Code, étudier la lecture au 21e siècle, c'est envisager comment les technologies émergentes et notamment la Grande convergence NBIC pourraient, non pas nous instrumentaliser, mais nous équiper pour que nous devenions de véritables lecteurs-fictionautes pratiquant la métalepse narrative comme méthode de lecture.
 
Les développements actuels de la robotique m'incitent à penser que nous devrions faire le pari que des androïdes dotés d'intelligence hériteraient tôt ou tard de l'espèce humaine qui les aurait imaginés et créés la capacité fabulatrice, le besoin d'imaginer d'autres mondes possibles et de se raconter des histoires, qui est peut-être la seule dimension qui nous caractérise fondamentalement sur l'éventail du vivant.
Est-ce à dire que le transhumain sera lecteur, ou alors qu'il ne sera pas ?
Serait-ce là, la ligne de démarcation entre transhumain, et, post-humain ? La lecture ?

lundi 27 juillet 2015

Cette Chose derrière le Code

Le code concerne le vivant. Avec le numérique, notre attention endormie, depuis longtemps détournée par les artifices du langage, se retrouve éblouie comme un lièvre pétrifié dans le faisceau aveuglant des phares d'un camion lancé sur lui. Que se passe-t-il ? C'est la nuit et nous rêvons que nous sommes éveillés. Simulacre de réalité, ou réalité simulée... Nous tenons, dans notre sommeil, comme preuves de notre éveil, l'apparence des choses manufacturées, le monde artificiel que notre langage désigne comme la réalité. Une jungle, une végétation sémantique qui substantifie son propre lexique.
Car le langage excède l'humain. Le langage outrepasse ses fonctions cognitives, car en plus de structurer notre pensée et notre représentation du réel, il alimente notre perpétuel monologue intérieur. Etant notre intime, il ne peut être réductible à une simple mécanique, dans le sens où nous ne nous considérons pas nous-mêmes, humains, comme de simples machines.
Mais le langage est un code actif qui nous programme. Transformer des données en information, c'est leur donner forme, en les chiffrant en l'occurrence en base binaire. Que penser du fait que tout ce que nous produisons devienne des nombres ? Nous vivons depuis plus de deux millions d'années un rêve éveillé, emporté dans la dynamique virale du langage, en partie peut-être assimilable à la "grammaire générative" et au "module du langage" de Chomsky, pour lequel : "l'acquisition du langage n'est pas (ou du moins pas essentiellement) un processus d'apprentissage. Elle serait plutôt à voir comme l'exécution d'un programme informatique implanté dans notre cerveau dès notre naissance" (Cf. Piaget, Chomsky et la faculté de langage). 
Alors quel est le nom de la Chose qui programme ? Cela, sans nom, s'exprime par différents mots que nous lui substituons faute de savoir la nommer de son nom véritable. L'innommable, à un premier niveau, celui d'une inhumanité ; l'indicible, pour notre pensée langagière ; l'ineffable, au plan souverain.
Car la Chose est unique. Je n'évoque pas ici les choses, mais le code source.
C'est l'innommée, cette inconnue qui nous précède. La Chose codante est cette présence qui nous a précédés avant le langage et la pensée verbale, avant la réflexion et la conscience de soi.
S'il y a bien un "quelque chose qui existe sans signifiant précis : un objet perdu mais que l’on n’a jamais perdu et que l’on recherche", sa quête serait peut-être alors à l'origine du langage.
Le plus souvent nous restons limités par les métaphores anthropomorphiques.
La prospective de la lecture est directement concernée, car le jour où nos gadgets électroniques seront des fossiles, il sera trop tard pour essayer de comprendre comment nous aurions peut-être pu au 21e siècle, nous délier d'une lecture aliénante, comment nous aurions pu découvrir ce qu'était véritablement la lecture, et comment nous aurions pu lire (décoder) autrement le rêve lucide dans lequel nous étions, nous sommes, embarqués.
La période de l'écriture informatique et réticulaire, comme troisième écheveau sémiologique pour Clarisse Herrenschmidt et qu'elle fait débuter en 1936 avec la Machine de Turing (Cf. Les trois écritures, Gallimard, 2007, p. 387 et suivantes), nous garde (nous sauvegarde peut-être ?) dans l'artifice, le simulacre et la simulation. Or, "Du simulacre naît la simulation : c'est-à-dire l'expérience d'un futur réel au travers de ce qui en est montré - le simulacre - et l'action sur ce simulacre.". (Herrenschmidt). C'est là en quelque sorte de la prospective appliquée.