Sur le blog Lire et Dé-lire des éditions belges BOZON2X j'ai ajouté en commentaires les deux post-scriptum ci-après à mon texte récent La lecture est une question d'espace (ce texte initial qu'ils viennent j'espère éclairer est évidemment toujours accessible). --------------------------------
Post-scriptum au texte initial :
Dans
ce deuxième temps de confinement je suis retourné sur les lieux par
le détour de la Toile (Web). Finalement ce genre d'interface de
cartographie numérique semble projeter dans l'espace du visible des
presque équivalents de processus mentaux de visualisation et de
remémoration. Selon le degré d'agrandissement, de rapprochement, ou
au contraire de rétrécissement, d'éloignement, que nous donnons à
la scène, d'une part le cadre et le hors-champ s'en trouvent
modifiés, d'autre part, la toponymie se spectralise. En clair des
noms de lieux apparaissent ou disparaissent selon. En écho
s’opéreraient peut-être une dilatation ou un amoindrissement des
souvenirs, selon... Ainsi, à en croire un certain niveau de zoom sur
la carte digitale tout aurait été toujours clair dans les faits et
rien n'aurait changé sur le terrain : Mitry-le-Neuf et Mitry-Mory.
Et Mitry Claye serait le nom de la gare commune à Mitry-Mory et à
Claye-Souilly, qui apparaît cependant bien en recul sur la carte,
comme la gare de Villeparisis-Mitry-le-Neuf porte un double nom.
Apparemment que l'on soit d'un bord ou de l'autre de la ligne du
chemin de fer déciderait du nom de la station, à moins que la
répartition se fasse à partir de la voie d'eau parallèle du Canal
de l'Ourcq. Mais ai-je vraiment habité ce lieu qui aujourd'hui se
délite en moi ? Hier comme aujourd'hui la terre sur laquelle ses
habitants réels marchent peut bien être terre d'aventures dans la
tête de leurs enfants ou d'un pauvre fou comme moi. Le délitement
du lieu n'est pas celui de ce territoire mais celui de mon propre
monde intérieur.
A
l'étrange sentiment de paix qui m'envahit lorsque je retourne
marcher dans ces rues se mêle incontestablement, il ne me vient pas
un instant à l'esprit de le contester, une certaine confusion
mentale. En somme, le temps passe et rien de fondamental ne change.
Le lieu et moi nous restons l'un à l'autre fidèles. Mais
probablement suis-je l'une des dernières personnes que je puisse
croire.
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Écrit
il y a trois ans, en 2017 :
Avec
les années, les lieux fréquentés dans notre passé s'estompent
progressivement dans notre mémoire. Leurs images deviennent plus
floues et incertaines, mais elles demeurent en nous cependant. La
vision intérieure que nous en avons leur confère le poids de la
nostalgie et, pour se préserver, leur étendue se limite à de
petits territoires bien circonscrits, sans plus rien à l’entour
d'eux. Le seuil d'une porte, une partie de couloir, un escalier, un
coin de véranda, un arbre. Mais telles sont également les images
qui nous restent en mémoire de certaines de nos lectures romanesques
passées, de telle manière qu'avec le temps notre imagerie mentale
des espaces réels, dans lesquels nous avons effectivement vécu, et,
les vestiges des images de ce que nous avons pu visualiser lors de
certaines de nos lectures, se rapprochent l'une de l'autre, et
finissent par acquérir le même degré de sensibilité et de
vraisemblance. Avec le temps, il nous semblerait bien que nous ayons
autant vécu dans la réalité que dans les livres.