Le développement des produits existants et la création de nouveaux produits restent les principaux moyens pour préserver ou acquérir un avantage compétitif.
L’innovation produit consiste principalement à l’amélioration d’un produit déjà existant, généralement par l’adoption/adaptation d’une nouvelle technologie. Dans une telle démarche, la place accordée, a priori, au client, à la demande, est capitale.
En tant que discipline qui s’applique à expliciter et à représenter les transformations et les nouvelles formes possibles d'organisations socio-économiques dans le secteur du livre et de son marché, afin d'y mettre en œuvre des stratégies de développement, la prospective de l’édition peut déployer des méthodologies adaptées aux éditeurs désireux de commercialiser des offres innovantes.
L’innovation produit est de fait au croisement de la prospective de l’édition et de la prospective du livre. En concevant le livre comme un dispositif de lecture, au fil des siècles perfectionné, et, aujourd’hui encore, perfectible, la prospective du livre recouvre, tant, la conception de nouveaux dispositifs de lecture, que l’évolution de l’actuelle interface, connue sous le nom de codex.
Le livre : un produit toujours nouveau
Deux exemples suffiront ici pour rappeler que l’innovation est depuis toujours le moteur de la pérennité et du développement du livre au fil des siècles. Nous ne les avons choisis, parmi de nombreux autres exemples possibles, que pour la simple raison que leurs illustrations sont, en quelque sorte, parlantes ;-)
D’abord, au 13e siècle, les livres de ceinture (Cf. 1ère illustration, source) et en déclinaison 21e siècle (Illustration de dessous, Artes del Libro, Rodrigo Ortega, 2006, source)
Ensuite au 14e, les roues à livres (book wheel), permettant, des siècles avant l’électricité, une lecture hypertexte !
Durant des siècles, artisans du livre et auteurs ont collaboré pour que l’objet livre puisse sublimer ses limites matérielles. Ces efforts se retrouvent tant dans les livres animés qui avaient devancé les fameux pop-up [Document], que, par exemple, dans les livres objets poétiques de Michel Butor [Vidéo : Michel Butor et ses livres-objets], ou encore, aujourd’hui, ces livres-coffrets que les éditions Hachette multiplient, notamment autour des arts de la table et avec leur maison Larousse [Interview : Livres objets : 4 Questions à Isabelle Jeuge-Maynart, Président-directeur général des Editions Larousse].
Aujourd’hui, dans une démarche de prospective appliquée au livre et à l’édition, l’innovation produit peut concrètement se décliner sur plusieurs axes :
=> L’ergonomie et le design des nouveaux dispositifs de lecture (il y a à faire !)
=> L’adaptation des règles typographiques aux affichages des nouveaux dispositifs de lecture.
=> Le reprint à valeur ajoutée (ré-exploiter le fonds éditorial en l’enrichissant…)
=> La création de livres papiers enrichis (inventer des passerelles imprimé/numérique).
Versant ergonomie et design des nouveaux dispositifs de lecture, c’est du côté des lecteurs d’ebooks pour enfants que la créativité s’exerce (Voir illustrations ci-dessous). Les nouveaux dispositifs de lecture pour lecteurs adultes restent très profilés high-tech, avec un niveau d’affordance faible et peu en phase avec l’habitus des lecteurs.
Le design éditorial recouvre certainement en cette année 2010 un champ des possibles à inventorier, alors que, d’une part, les premières intrusions de la réalité augmentée dans l’univers du livre se conçoivent pour la plupart sur des enrichissements de livres imprimés (Voir illustrations ci-dessous), et que, d’autre part, des discours de plus en plus structurés et fondés reconnaissent les qualités spécifiques de l’interface du codex [par exemple : Pourquoi l'ebook ne remplacera jamais les vrais livres, par Jan Swafford, traduit par Bérengère Viennot, sur Slate.fr].
Pour ce qui est de la question du support en tant que tel, tout laisse penser qu’un papiel [papier électronique] présentant, à la fois, les qualités du papier, et, celles des écrans tactiles capacitif MultiTouch [type iPhone, iPad] verra le jour, disons… avant 2050 ;-)
Nous passerions en fait simplement du papier de cellulose, au papier de polymère (l’emploi du terme “écran”, engendré par le design high-tech des dispositifs, le conditionnement de la télévision et des ordinateurs, nous induirait en erreur !).
Cette question de l’évolution du support papier ne doit pas évacuer que nous passerions d’un modèle avec un dispositif de lecture majoritaire (le codex) à une pluralité de supports d’affichage, selon les contextes et les usages de lecture. L’innovation produit ayant là aussi sa place.
Quelques exemples seulement, parmi les plus innovants… La lecture 3D immersive sur lunettes vidéos pourrait se développer [premiers pas : Livres 3D testés par Google]. La peau, certainement le premier support d’inscription avant les pierres et le bois, ou bien des lentilles de contact que nous porterions à même le globe oculaire, pourraient donner à la lecture des dimensions que nous ne pouvons pas véritablement concevoir, mais que nous nous devons d’imaginer, voire d’anticiper [Cf. dossier Futura Sciences : Vers la réalité augmentée].
Nous dériverions ainsi vers des interfaces de lecture de type Minority Report [Cf. Vers des interfaces façon Minority Report] ou sur le modèle de Caprica e-paper "computer sheet" futuristic gadget.
Autant d’aspects des perspectives qui s’ouvrent pour le livre au 21e siècle, et dont le Labo BnF commence à donner aux lecteurs et aux professionnels une première idée.
Nous pouvons d’ores et déjà lister quelques premiers acteurs du livre augmenté :
- BookBeo (France) = http://blog.bookbeo.com/
- Carlton Books (Angleterre) (Dinosaurs Alive & Fairyland Magic, Leovation) Infos à partir de: http://publigeekaire.com/2010/06/2-nouveaux-livres-en-realite-augmentee-dinosaurs-alive-fairyland-magic/
- Nathan (France) (Collections Dokéo et Dokéo+) = www.nathan.fr/dokeolivre/?page=realite-augmentee et http://www.dokeo-realiteaugmentee.com/
- Templar Publishing (Angleterre) = www.templarco.co.uk/ologies/dragonology.html
Une gestion contrôlée de cette véritable révolution du livre passe par :
=> Le développement de stratégies CRM (Customer Relationship Management),
=> Le dépassement des DRM (Digital Rights Management).
Introduire la gestion de la relation client dans l’édition
Les changements qui vont se produire au sein du marché du livre, à court et moyen termes, rendent nécessaire une redéfinition rapide et opérationnelle des stratégies commerciales.
Il faut aujourd’hui que les éditeurs aillent plus loin dans leurs relations avec les lecteurs.
Qu’attendent-ils de l’édition numérique ?
Que veulent-ils d’un ebook par rapport à un livre imprimé ?
Quels usages veulent-ils faire d’un nouveau dispositif de lecture ? Etc.
La nouvelle donne numérique va maintenant très vite imposer aux éditeurs la nécessité de redéfinir sur de nouvelles bases leurs relations, en amont, avec leurs auteurs, en aval, avec les lecteurs.
Pour perdurer face aux start-up de l’édition pure player, les sociétés d’éditions imprimées vont devoir, d’une part, organiser et développer leur management de l'innovation, d’autre part, organiser et développer des stratégies de web marketing.
Il est clair que la recherche des nouveaux modèles économiques évolue dans ce sens : que ce soit avec les ventes aux chapitres et les livres à la carte, l’impression à la demande, l’explosion de l’autopublication et des publications on line, l’apparition des premières sociétés d’éditions participatives.
Stratégies de crowdsourcing et de crowdfunding seraient-elles les mamelles de l’édition du 21e siècle ?
L’innovation : une arme pour lutter contre le piratage
Dans cette perspective le piratage ne doit plus être une crainte paralysante. Piratage et contrefaçons existent certainement depuis l’Homo faber, l’homme capable de fabriquer des outils.
L’histoire du livre en France foisonne de cas de contrefaçons, qui se concoctaient jadis derrière les frontières belge et suisse. L’encyclopédie de Diderot et d’Alembert en fit les frais.
L’exemple catastrophique de l’industrie musicale démontre clairement que les DRM qui limitent les droits des utilisateurs relèvent du suicide économique.
Les solutions sont, une fois de plus, dans l’innovation produit et la gestion de la relation client.
Innover et déplacer la valeur de l’expérience lecture à un niveau non contrefaisable, innover et déplacer la créativité au niveau d’applications de lectures conversationnelles, en considérant les nouveaux dispositifs de lecture comme des interfaces lecteurs/livres, et non plus comme de simples écrans à afficher des reproductions de livres imprimés.
L'innovation dans le papier peint http://www.lesartsdecoratifs.fr/francais/accueil-292/une-486/francais/arts-decoratifs/expositions-23/actuellement-501/au-niveau-5/le-wallpaperlab-d-a3p-880/ pourrait-elle en partie converger ou bien éclairer l'innovation en édition papier ?
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