mercredi 7 mars 2012

Les (r)évolutions du monde des bibliothèques

J'aurai le plaisir de participer le jeudi 05 avril 2012 à la journée d'étude organisée par Bibdoc37, réseau départemental d'Indre-et-Loire ouvert aux professionnels des bibliothèques, services d’archives et centres de documentation du secteur public et privé, consacrée au thème : Les (r)évolutions du monde des bibliothèques : entre pragmatisme et utopie.
  
  
Pour ma part j'interviendrai en fin de journée pour une conférence sur le sujet : Impacts des livres numériques sur les bibliothèques, puis en clôture en équipe avec Thomas Chaimbault (responsable de la formation des bibliothécaires d’État à l’Enssib), pour une conclusion prospective : Les bibliothèques en 2042 ;-)

dimanche 4 mars 2012

Semaine 09/52 : De la diffusion à l'infusion

Durant l’année 2012 j’ai décidé de publier ici même chaque semaine un billet exprimant mon ressenti personnel sur la semaine précédente, dans la perspective, bien évidemment, des problématiques de la prospective du livre et de l’édition.
Ce post est donc le 09/52. 
  
Les technologies de la communication engendrent un environnement pervasif dans lequel nous baignons. Nous sommes immergés dans cet environnement pervasif, submergés par les données, comme par l’air que nous respirons, sans toutefois nous y sentir encore comme des poissons dans l’eau. Car il s’agit en effet d’un changement d’atmosphère, d’une sorte de naissance avec le passage du liquide amniotique à l’air ambiant du monde extérieur, d’un nouveau monde à conquérir.
« Un environnement pervasif (ou environnement ubiquitaire) correspond à un fonctionnement global de la communication où une informatique diffuse permet à des objets communicants de se reconnaitre entre eux et de se localiser automatiquement » (source Wikipédia).
 
Je pense que les dispositifs de lecture à venir relèveront ainsi de l’expérience du "sixième sens" développée au MIT (là où se développa notamment l’e-paper). 
  
Je poursuis donc cette semaine mes réflexions des semaines écoulées.
Avec un certain étonnement je constate qu’il n’y a pas véritablement eu pour moi d’éléments marquants cette semaine.
Cette absence de fait marquant, dans une semaine surchargée et débordante d’informations et de polémiques, est, en soi, un fait marquant. 
  
Psychogéographie et ubiquité
  
L’ubiquité, cette faculté d’essence divine de pouvoir être, au même moment, présent en plusieurs lieux, et que nous commençons, nous autres humains, à pouvoir expérimenter, l’ubiquité interroge (je l’ai évoqué les semaines passées) notre rapport à l’espace (et donc aux livres).
 
J’ai découvert par sérendipité cette semaine le concept de psychogéographie. Je pense qu’il pourrait peut-être éclairer de manière originale les effets de l’exploration des territoires digitaux sur les capacités cognitives et la sociabilité des internautes.
En 1955 Guy Debord avait défini ainsi son concept de psychogéographie, comme se proposant d’être : « l'étude des lois exactes, et des effets précis du milieu géographique, consciemment aménagé ou non, agissant directement sur le comportement affectif des individus. ».
Versant histoire du livre, ces concepts d’ubiquité et de psychogéographie pourraient-ils trouver une perspective dans les réflexions que j’ai précédemment amorcées ?
Par exemple, ce que Yann Minh écrivait dans MCD #59 de l’été 2010 (Musiques & Cultures Digitales), au sujet de l’influence, de l’interpénétration, de l’intrusion des personnages dans le monde prétendument "réel", car perçu avec nos sens physiques et interprété avec notre cerveau. Cette interpénétration, cette intrusion sont en train de se réaliser et seront généralisées d’ici quelques années avec l’avènement d’un univers (uni-vers) ubiquitaire.
« Pendant l’écriture de mon roman Thanatos, Les Récifs, j’ai, écrit Yann Minh, "invoqué" dans mon esprit les héros de ma dramaturgie qui ont acquis ainsi une forme d’existence "noosphérique" plus intense. Par le biais de leur "mise en scène" dans le roman, cette "existence immatérielle" a été partagée par plusieurs milliers de lecteurs, générant par-là une ébauche "d’existence sociale" virtuelle. Les auteurs de fiction connaissent ce phénomène décrit par Pirandello qui s’est retrouvé, selon ses propres écrits, hanté par ses fameux six personnages en quête d’auteur.
Ainsi, beaucoup de héros de romans, de théâtre, de textes anciens, de cinéma - Don Quichotte, Les Trois Mousquetaires, Moïse, Sherlock Holmes, Spock, Buffy, Ripley, Don Juan, Marilyn Monroe, etc., etc. - ont acquis avec le temps cette relative forme d’existence et d’autonomie informationnelle : une noo-sociabilité.
Grâce aux mondes persistants qui permettent une interaction en temps réel, comme un acteur qui jouerait un "personnage" au quotidien, j’ai expérimenté le fait "d’invoquer" Dyl, l’héroïne de mon roman, que j’ai "incarnée" pendant deux ans dans le cyberespace, (Myspace, blog, Second Life) afin d’enrichir ma cosmogonie des Récifs par une propagation transmedia de mes héros de fiction. » (Lire l’intégralité du texte en suivant ce lien et se reporter à la conférence que donnera sur ce thème Yann Minh ce vendredi 09 mars sur l’incubateur 3D MétaLectures…).
Rappelons que pour Teilhard de Chardin la "noosphère" désigne la « sphère de la pensée humaine ». Cela m’apparaît proche de cet environnement pervasif généré par les technologies de la communication, et de ce que j’ai appelé ailleurs la "bibliosphère". 
  
Comment qualifier cette naissance à la noospshère ?
  
Nous pourrions dire que c’est un phénomène.
Car il s’agit bien d’un ensemble de faits convergents, constatés, observables et observés, et susceptibles d’études scientifiques.
Ce que nous vivons, et qui va bien au-delà du seul passage de l’édition imprimée à l’édition numérique, est donc un phénomène.
 
Ce phénomène s’inscrit sur un temps bien plus long que celui des bavardages stériles de nombre de blogs et des réseaux sociaux. Aussi ces derniers ne peuvent-ils en rendre compte.
Le phénomène dépasse la France, la francophonie, et même les États-Unis.
Il est mondial.
Les enjeux sont civilisationnels.
Ils semblent s’exprimer dans la convergence des médias et l’invasion des robots lecteurs. 
  
Les robots lecteurs sont déjà parmi nous en nombre. Omniprésents. Nous n’en avons pratiquement pas conscience, simplement parce qu’ils ne se présentent pas à nous sous des formes humanoïdes. Mais, que sont, par exemple, les moteurs de recherche, sinon des systèmes robotiques de lecture du web ? 
  
Expansion de l’environnement (ce qui nous environne) pervasif ; influence ; interpénétration ; intrusion ; ubiquité… Des experts de la théorie de la singularité technologique prédisent le point de bascule vers l’an 2030 (dans 18 ans).
Ces perspectives incitent à relativiser le chaos quotidien.
  
Il est alors grandement déplorable que la parole soit confisquée, comme elle l’est, par les discours corporatistes, de part et d’autre, par la propagande des lobbies et la désinformation des professionnels du marketing, mais aussi, par le bavardage incessant de beaucoup qui parlent haut et fort d’une édition qualifiée de numérique, alors qu’ils n’ont en vérité aucune vision structurée et structurante, ni du passé ni du devenir du livre. 
  
Certes, des événements factuels, sont symptomatiques, expriment la crise de croissance et de confiance que nous traversons.
Ils doivent être entendus et pris en considération.
 
Je pense ici aux actions légitimes conduites depuis quelques semaines par le collectif Le droit du serf autour de l’auteur de science-fiction et de thriller Ayerdhal (« Collectif de réflexion et d'action créé en octobre 2000 pour faire respecter le droit des auteurs à jouir décemment de leurs œuvres, réactivé fin 2009 pour faire valoir ce droit dans la commercialisation numérique de leurs ouvrages. ») qui mobilise avec vigueur contre une proposition de loi dite "des livres indisponibles", laquelle permettrait l'exploitation numérique de tout livre publié en France avant la date du 1er janvier 2001 et qui ne serait plus l'objet d'une diffusion commerciale par un éditeur. 
  
Des idées passagères mériteraient davantage notre attention aussi.
Dans l’élan de son conflit avec les éditions Gallimard, François Bon aurait exprimé cette idée qu’ : « Il faudrait faire des exceptions pour des classiques modernes de la littérature en les considérant comme relevant du patrimoine universel de l’humanité. L’Unesco le fait bien pour des lieux : pourquoi pas pour des livres ? ». Ce qu’il fallait dire en effet.
Sur son blog La République des livres, Pierre Assouline fait bien de relever cette idée, presque passée inaperçue dans la logorrhée de la blogosphère.
Oui : les grandes œuvres de la littérature doivent appartenir au patrimoine universel de l’humanité.
Qu’un roman, tel "La peste" d’Albert Camus, par exemple, soit payant en version imprimée est parfaitement normal. Imprimer a un coût. Mais un tel roman doit également être en accès libre en version numérique pour chaque habitant(e) de la planète.
Que l’Unesco joue ici son rôle et assume ses responsabilités face aux logiques marchandes.
Les grandes œuvres de la littérature appartiennent de fait au patrimoine universel de l’humanité.
 
Je vais être clair. Pour moi, nous ne devrions pas dire : « En France, "Le vieil homme et la mer" d’Hemingway est protégé jusqu'en 2032. », mais plutôt : « En France les droits sur "Le vieil homme et la mer" d’Hemingway sont préemptés jusqu'en 2032. ».
 
2032 ! Ridicule, si l’on songe que des experts de la théorie de la singularité technologique prédisent le point de bascule vers l’an 2030 ! 
  
Un prodige agissant. Une seconde Renaissance ?
   
Bien au-dessus de ces mesquineries, le phénomène à l’œuvre est un véritable prodige agissant qui annonce peut-être une nouvelle Renaissance (?).
 
A l’initiative, entre autres, du bibliologue belge Paul Otlet Le Mundaneum (1998), projet visant à rassembler l’ensemble des connaissances du monde, s’inscrit dans le droit fil du Memex (1945) de Vannevar Bush, lequel poursuit la Roue à livres (1588) d’Agostino Ramelli, lequel s’inscrivait dans la lignée des inventeurs mésopotamiens de l’écriture (-3300).
 
Sur cette ligne du temps des points frétillants marquent des pics, des échauffements, ils peuvent être des accélérateurs, mais ils ne doivent pas nous désorienter.
  
Actuellement un prodige agissant est entré en action (quand ? A partir de quand ?). La reconfiguration à l’œuvre, opéra phénoménal, remet en jeu notre appréhension et notre compréhension des connaissances.
 
Elle nous demande de faire la part du conjoncturel, du débat passager, d’avec ce qui restructure.
 
C’est ainsi qu’il faut je pense, au moins en prospective du livre, repenser le numérique sur une échelle de temps bien plus large que la vision étriquée des commentateurs.
 
Si nous pensons le numérique comme une fabuleuse boite à outils, des outils qui ne sont que dans le prolongement de ceux maniés jadis par nos ancêtres, nous prenons conscience alors de la futilité des gadgets technologiques, tels les iPhone, iPad et autres Kindle, qui ne sont que des jouets pour adultes, plus exactement : pour consommateurs.
  
Si nous assistons à la naissance d’une seconde Renaissance, nous pourrions vivre l’évanouissement du livre dans le passage. Un moment unique alors dans l’histoire de l’humanité.
  
Le phénomène que j’évoquais ne serait-il donc qu’un simple phénomène de substitution ? (Non. Je pense qu’il va au-delà, plus loin que de substituer le codex au rouleau, par exemple…). Pour l’instant c’est le terme "évanouissement" qui s’impose à moi, mais cela me dérange car l’évanouissement est "une perte de connaissance" (?).
   
Il est sans doute temps de conclure pour cette semaine ces réflexions en direct…
Pour le dictionnaire Littré : diffuser c’est « Répandre de çà et de là, répandre à travers », et, infuser c’est : « Faire pénétrer un liquide dans quelque chose. La Fable raconte que Médée infusa un sang nouveau dans le corps du père de Jason. ».
Nous constatons bien, jours après jours, semaines après semaines, que le modèle de la diffusion des livres imprimés n’est pas applicable aux livres numériques qui s’infusent dans les lectorats des internautes de la noosphère.
Ainsi passerions-nous de la diffusion des livres à l’infusion des textes.
 

lundi 27 février 2012

Avatars et personnages de romans, la conférence !

"Un avatar est un personnage représentant un utilisateur sur Internet et dans les jeux vidéo." (Wikipédia). Nous savons tous ce qu'est un personnage de roman.
 A partir de l'exemple de Dyl, héroïne de son roman de SF : Thanatos. Les Récifs. (téléchargeable gratuitement ici), et qui prit vie sur Second Life, Yann Minh, écrivain de science-fiction, artiste vidéo et réalisateur transmédia, donnera une conférence exceptionnelle sur les rapports entre avatars et personnages de romans, le vendredi 09 mars 2012 à 21H15 dans l'auditorium de l'incubateur MétaLectures que j'ai lancé ce 1er janvier 2012 en partenariat avec Francogrid.

Pour participer à l'aventure voir ici

dimanche 26 février 2012

Semaine 08/52 : Je est une bibliothèque

Durant l’année 2012 j’ai décidé de publier ici même chaque semaine un billet exprimant mon ressenti personnel sur la semaine précédente, dans la perspective, bien évidemment, des problématiques de la prospective du livre et de l’édition.
Ce post est donc le 08/52.
 
Cette semaine j’ai une nouvelle fois eu l’occasion de m’exprimer devant un auditoire de bibliothécaires et j’ai pu, une nouvelle fois, juger leur intérêt pour la prospective du livre et constater que ce sont certainement, de tous les acteurs de l’interprofession du livre, ceux qui, étant le moins soumis aux contraintes du marché du livre, sont le plus ouverts à ses mutations. (Nous pouvons d’ailleurs le constater dans les blogs et sur les réseaux sociaux…)
Avec les lecteurs, les bibliothécaires sont je pense ceux chez lesquels l’avenir du livre pourra tracer sa voie, alors qu’il ira en se (con)fondant dans l’abrutissement collectif des médias de masse avec les mastodontes du numérique, de la téléphonie, et autres de la grande distribution.
  
Le volume, ce ferment…
  
(Clin d’œil au fameux : "Le livre, ce ferment", dernier chapitre de L’apparition du livre, de Lucien Febvre et Henri-Jean Martin ;-)
Comme l’exprime Alberto Manguel dans son remarquable essai, que nous devrions tous relire : La Bibliothèque, la nuit (Actes Sud éd., 2006), et précisément dans la troisième partie de son ouvrage : "UN ESPACE" : « Pourtant, les deux bibliothèques – celle de papier et l'électronique – peuvent et devraient coexister. » (p. 79).
Oui, il est bien question d’espace (et même de grands espaces) dans le livre et la lecture.
 
Si le volume du livre n’existe que par l’empilement des feuilles de papier (l’acte d’empiler, des pierres ou des papiers, est archétypal chez l’espèce humaine il me semble), le lu en lui, est multidimensionnel, parfois aux limites de l’universel, et il perd en perspectives cet objet de la lecture, pris au piège dans les deux dimensions, plates, largeur et longueur, des pages, tout comme des écrans.
 
De la Tour de Babel à la Bibliothêkê, des coffres de bois dans lesquels on rangeait les volumes, aux tours de la BnF, et aujourd’hui aux fantasmes d’un "livre dématérialisé", quel lien ?
 
(Ces quatre tours de la BnF, c’est un mensonge de prétendre le contraire, ne ressemblent absolument pas à des livres ouverts.)
(Le livre dématérialisé, dans le nuage (cloud) ah ? Mais il n’y a pas de livres dans les nuages, juste des gouttelettes d’eau ou des cristaux de glaces, il n’y a pas de lettres, il n’y a pas de mots, et les centres de traitements des données (data centers) sont d’imposantes structures matérielles, consommatrices d’énergie, des (cybers) bibliothèques mutantes.)
 
Excepté les livres de pierre (l’architecture et la sculpture) les écritures se seraient toujours développées en deux dimensions (si je laisse de côté les écritures cunéiformes en creux dans l’argile) alors que nous lisons, j’entends par là que nous concevons imaginairement ce que nous interprétons des signes lus, en relief, en volume (on dirait aujourd’hui en 3D, mais encore y-a-t-il certainement d’autres dimensions que purement physiques…).
 
Ce 22 février j’ai noté avec intérêt la résonnance d’un post de Frédéric Kaplan (Bookworld : un monde où chaque ville est un livre : « Dans Bookworld, chaque livre est une ville. Le quartier downtown regroupe symbolise la structure de l’ouvrage. Chaque chapitre est une tour plus ou moins haute, la structure du livre définit ainsi une “skyline” unique et caractéristique de son organisation. Tout autour de ce quartier central, des faubourgs présentent les découvertes faites par des lecteurs… ») avec les réflexions que je développe depuis quelques années en prospective du livre.
  
Je suis un bipède, un (dé)lire sur pattes
  
Vous aussi. Nous tous. Mais quel lien alors, entre un empilement de pierres et une "dématérialisation du livre" ?
 
Que faut-il délier ou dé-lire dans l’histoire du livre et de la lecture ?
 
Le fil est je pense le suivant : acquisition de la bipédie => acquisition du langage articulé => invention des écritures => lecture => "et maintenant que vais-je faire ?" (2012).
 
La réflexion collective que nous avons amorcée en petit nombre le vendredi 24 février 2012 de cette semaine, autour de Vincent Mignerot sur l’incubateur 3D MétaLectures, sur le sujet des rapports entre les synesthésies et la lecture s’inscrit dans cette tentative d’écrire le chapitre suivant de notre histoire.
 
J’ai également appris incidemment cette semaine (mais le hasard existe-t-il ?) qu’un programme de lecture des pensées permettrait de traduire l’activité du cerveau en mots.
« Les scientifiques ont enregistré des fragments de pensées de personnes, en décodant l’activité cérébrale provoquée par les mots qu’ils entendent. Le remarquable exploit a donné aux chercheurs une vision nouvelle sur la façon dont le cerveau traite la langue et soulève la perspective alléchante d’appareils qui pourrait donner une voix aux personnes rendues muettes. Encore à ses débuts, le projet ouvre la voie à des implants cérébraux qui pourraient surveiller les pensées d’une personne et prononcer des mots et des phrases alors qu’ils sont imaginés. Ces dispositifs pourraient transformer la vie de milliers de personnes qui perdent la capacité de parler à la suite d’un accident vasculaire cérébral ou d’autres conditions médicales. » (Source). L’information doit être prise avec réserves, mais elle témoigne nonobstant d’un intérêt persistant, voire grandissant, des neurosciences pour les processus de la lecture.
  
Par exemple, si les neurones miroirs s’activent à la lecture de certaines scènes de romans, alors où finit la fiction ?
 
La lecture (synesthète ou pas) permettrait-elle (permet-elle) d’accéder à une sensibilité augmentée ? (L’expression « sensibilité augmentée » est d’Anne Astier, ce vendredi soir).
   
Aujourd'hui, alors qu'en 2012 nous avons entamé la dernière décennie de la séquence des e-incunables (si nous acceptons l'hypothèse 1971-2022) personne ne peut affirmer, face à l'évolution accélérée des technologies d'affichage, face à la volatilité des données numériques et à leurs fortes potentialités d'avatarisation, dans des objets (internet des objets) ou des projections d'internautes (sur le métavers notamment), face à la montée en puissance de la 3D et du transmédia, personne ne peut raisonnablement affirmer que la lecture va rester l'activité que nous appelons aujourd'hui "lecture".
Lire est plus vaste que lire du texte noir sur blanc, sur papier imprimé, ou sur papier électronique, ou sur écran.
    
Je sais pertinemment que ce qui se conçoit bien s’énonce clairement (Cf. Boileau), mais, en l’occurrence, les mots pour le dire me viennent trop aisément, et sans doute est-ce pour cela que je ne parviens pas à la clarté nécessaire pour chasser les ténèbres des préjugés et de la dictature douce de la société du spectacle.
Je défriche.
Mais vous ? Savez-vous ce que vous faites en ce moment précis, en cet instant même où je vous apostrophe ?
Avez-vous une claire conscience de ce qui est en jeu ?
Vous rendez-vous compte de ce que vous déchiffrez ?
  
Les grands cimetières sous les livres…
  
Ce n’est pas sans raison que j’ai intitulé l’opus de cette semaine : « Je est une bibliothèque ».
Ce n’est pas sans raison que j’avais mis en exergue de mon livre : De la Bibliothèque à la Bibliosphère, cette citation de Charles Dantzig : « La bibliothèque est le seul concurrent des cimetières. » (Pourquoi lire ? Grasset éd., 2010).
L’expression : « Je est une bibliothèque » résume l’odyssée que je dessine dans mon livre : de la bibliothèque qui contient les livres, au livre qui contient les bibliothèques, et, un jour…, la lectrice, le lecteur qui contient le livre qui contient les bibliothèques.
Nous y sommes presque.
Technologiquement c’est déjà possible.
Il s’agirait simplement de pouvoir tous jouir de notre liberté d’accès aux biens culturels universels que sont les livres.
 
Mais il y a un quart d’heure à peine, j’ai voulu voir ce que je pourrais, librement et légalement, télécharger d’André Gide.
Résultat : "Téléchargement interdit dans l'Union européenne et la Suisse (filtre géographique basé sur l'adresse IP)".
Qui veut mes derniers petits sous pour que je puisse relire Gide ?
Que la honte soit sur eux.
Je est une bibliothèque en marche et continuera d’avancer.
 
Bibliographie
La Bibliothèque, la nuit, Alberto Manguel.

samedi 25 février 2012

Synesthésies et lecture

Vincent Mignerot a présenté hier soir sur l'incubateur MétaLectures son Projet Synesthéorie. Il y présentera le vendredi 30 mars 2012 une conférence sur les rapports entre les synesthésies et la lecture.
Cette approche s'inscrit dans une suite logique à la direction que j'indiquais ici même dans mon post du 1er septembre 2011 : Retour à une lecture hallucinatoire ?
J'y rappelais notamment ce passage d'Une histoire de la lecture, d'Alberto Manguel, lorsqu'il signale à ses lecteurs que le psychologue américain Julian Jaynes a émis l’hypothèse que : « Lire pendant le troisième millénaire avant notre ère revenait […] à entendre les cunéiformes, c’est-à-dire à imaginer le discours de façon hallucinatoire en regardant les signes qui le symbolisent, plutôt qu’à reconnaître visuellement les syllabes de la façon qui est la nôtre. ».
   
Aujourd'hui, alors qu'en 2012 nous serions dans la dernière décennie de la période des e-incunables (si nous acceptons l'hypothèse 1971-2022) personne ne peut affirmer, face à l'évolution accélérée des technologies d'affichage, face à la volatilité des données numériques et à leurs fortes potentialités d'avatarisation, dans des objets (internet des objets) ou des projections d'internautes (sur le métavers notamment), face à la montée en puissance de la 3D et du transmédia, personne ne peut raisonnablement affirmer que la lecture va rester l'activité que nous appelons aujourd'hui "lecture".
Lire est plus vaste que lire du texte noir sur blanc, sur papier ou sur papier électronique ou sur écran. 
  
Pour suivre le développement de cette réflexion collective sur les rapports entre les synesthésies et la lecture, et voir la vidéo projetée hier soir dans l'auditorium MétaLectures / Francogrid (photo) :  Des possibles apports de la synesthésie pour comprendre la lecture...
 

vendredi 24 février 2012

Ouvrir les yeux sur le passage à l'édition numérique

J'ai eu le plaisir hier d'intervenir pour le compte du Conseil général et de la Bibliothèque départementale de l'Aisne à la médiathèque l'Oiseau Lire, à Tergnier, pour une journée de formation sur le thème : "Le livre électronique".
L'occasion, devant une salle pleine, attentive et participante, d'exposer dans leurs grandes lignes les caractéristiques et les enjeux de ces années 1971-2022 (?) d'e-incunables que nous traversons tant bien que mal, et de bien distinguer les dispositifs de lecture utilisant la technologie d'affichage de l'encre et du papier électroniques des autres gadgets technologiques.
 
L'occasion aussi de mettre en garde les bibliothécaires contre les arnaques des industries numériques du divertissement de masse, d'attirer leur attention sur "les dangers du livre électronique" justement pointés par Richard Stallman, de les avertir de ce à quoi ils s'engagent en achetant une tablette de type Kindle, par exemple, en résumé : de leur ouvrir aussi les yeux sur les aspects négatifs du passage de l'édition imprimée à l'édition numérique, où les atteintes à la liberté des lecteurs se multiplient et où les auteurs qui ne sont pas "bankables" ne sont pas davantage respectés.
 
Illustrations : D.R. "Picardie en ligne".

lundi 20 février 2012

Nouvelle initiative sur MétaLectures : présentation du Projet Synesthéorie...


La vidéo de la soirée d'inauguration du 10 février 2012,
"De la narration linéaire à la narration multidimensionnelle"
par Anne Astier