La lecture, en l’espèce de livres imprimés, reste essentielle pour comprendre le monde et ses évolutions. En cette rentrée littéraire, faisant en partie fi de l’actualité, je me penche avec attention sur deux ouvrages qui m’avaient précédemment échappé, et qui se révèlent cependant essentiels pour mieux appréhender et pour moins redouter les mutations du livre et de son marché, de l’écriture et de la lecture, durant ce 21e siècle.
Histoire et pouvoirs de l’écrit
D’abord, Histoire et pouvoirs de l’écrit, par Henri-Jean Martin, aux éditions Albin Michel (Collection Bibliothèque de l’Evolution de l’Humanité). Pour mémoire, Henri-Jean Martin fut, dans cette même collection, avec Lucien Febvre, l’auteur de l’ouvrage de référence : L’apparition du livre.
Dans Histoire et pouvoirs de l’écrit (1988), il pose ces questions essentielles : « Qu’en sera-t-il demain de l’écrit ? Quel est l’avenir du livre et de la lecture ? ».
« Au lieu de prophétiser la fin de la galaxie Gutenberg, [Henri-Jean Martin] a préféré se faire l’historien du règne de la “raison graphique”. […] il analyse ici la lente maturation de la civilisation de l’écrit ainsi que les révolutions mentales et techniques qui l’ont rendue possible. Si la mise en perspective historique permet de comprendre l’interaction entre les avancées du savoir et les multiples pouvoirs de l’écriture, de même, elle éclaire la mutation de la circulation de l’information qui, s’accélère aujourd’hui, avec l’informatique et les nouveaux médias [des éclairages de 1996 de Bruno Delmas sur ces derniers aspects]… » (Extraits quatrième de couverture, c’est nous qui soulignons ;-)
Ma lecture est en cours, mais il m’apparaît déjà clairement que l’approche d’Henri-Jean Martin permet de relativiser les connaissances et les certitudes avec lesquelles nous pourrions facilement nous illusionner à bon compte. L’auteur n’occulte pas les problèmes qui se posent souvent aux historiens, quant à l’absence de sources fiables, ou bien aux incertitudes et aux influences des interprétations, forcément soumises à l’état des lieux des connaissances à un moment donné, d’une part, d’autre part, au point de vue forcément subjectif de l’époque et de la société de l’historien observateur du passé.
Petits traités
Ensuite, les Petits traités I, par Pascal Quignard (en Folio, 1997). Mon attention sur ce livre, qui au simple survol m’apparaît essentiel, a été heureusement retenue par quelques propos discrets de François Bon.
Je trouverai certainement à sa lecture des lumières sur les notions de pages (Ve traité : Pagina), sur “Le Livre des lumières”, “La bibliothèque”, “Les premiers codex”, le “Liber”, etc., et enfin, “Sur les rapports que le texte et l’image n’entretiennent pas” (intéressant à l’heure des premières œuvres portées sur iPad ;-)
L’actualité cependant s’impose à la lecture, lorsque Pascal Quignard s’étonne avec justesse dans son XXIe traité : “Jésus baissé pour écrire”, que : « les Chrétiens n’ont pas cru qu’il serait judicieux de conserver ce que leur dieu avait écrit. »
Citons l’auteur : « Cette scène étrange, nous précise-t-il, est dans Jean, VIII (The Greek New Testament, London, 1966, page 414). Jésus est assis dans le Temple. Scribes et Pharisiens mènent auprès de lui une femme qui a été surprise en flagrant délit d’adultère. Les sages hébreux rappellent que la loi prescrit qu’elle soit lapidée. Ils lui demandent quelle est sa loi : “Mais Jésus, s’étant baissé, écrivait avec le doigt sur la terre. Et comme ils persistaient à l’interroger, il se redressa et leur dit : « Que celui de vous qui est sans péché lui jette la première pierre. » Puis, s’étant baissé de nouveau, il écrivait sur la terre.”… »
Qu’écrivait-il ?
Je recommande quelques autres lectures, sur les livres et la lecture, dans la colonne de droite du présent blog. Des sources de réflexion et d’inspiration, à mon humble avis, plus pertinentes que la seule consultation des blogs américains, pour comprendre les enjeux universels de l’écriture et de la lecture.
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