J'ai trouvé la nuit dernière chez Blanchot cette définition du livre mallarméen : "C'est un livre nombreux, qui se multiplie comme en lui-même par un mouvement qui lui est propre et où la diversité, selon des profondeurs différentes, de l'espace où il se développe, s'accomplit nécessairement." et qui épouse, je pense, ce que pourrait être un livre numérique (?).
J'entends par "livre numérique" un qui ne serait ni, sous quelques formes que cela soit, le reflet d'un livre dans un quelconque dispositif électronique d'affichage, ni, le simple produit d'animations numériques sans rapport aucun de filiation avec le livre.
Il n'y a pas.
Il n'y a ni livre numérique ni lecture numérique.
Il y a des dispositifs d'affichage électroniques qui ont vocation ou prétention à se proposer (se vendre) comme des machines à lire, et qui engendrent des pratiques de lecture spécifiques à leurs usages.
Je crois cependant qu'il y aura bel et bien un jour des livres numériques tels qu'ils répondront à cette définition (pourront dialoguer avec) : "un livre nombreux, qui se multiplie comme en lui-même par un mouvement qui lui est propre et où la diversité, selon des profondeurs différentes, de l'espace où il se développe, s'accomplit nécessairement." ; je crois, oui, que le livre imprimé ne pourra, comme le poète, se dissiper qu'en s'affirmant dans sa disparition même, et que son avenir se rêve déjà aujourd'hui, précisément, dans le devenir de cette disparition.
Ce rêve d'un outre-livre outrepasse nos facultés de projection.
Notre imagination est prise en défaut.
Car de fait "la littérature ne saurait être conçue dans son intégrité essentielle qu'à partir de l'expérience qui lui retire les conditions usuelles de possibilité." (Blanchot au sujet de Mallarmé).
C'est uniquement, je crois, par une conversion de la littérature que pourra se résoudre la métamorphose du livre en quelque nouvel espace de l'être.
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