jeudi 13 février 2020

Des virus dans des textes de fictions

La loi de Zipf montre que la fréquence d’utilisation d’un mot dans un texte est inversement proportionnelle à son rang, dans Ulysse de Joyce le mot le plus fréquent revient 8 000 fois, le dixième 800 fois, etc., cette constatation pourrait nous mettre sur la voie de formes latentes de vie contenues dans les textes.
  
Qu'il y ait un virus dans un programme informatique nous le concevons. Qu'il y en ait dans d'autres formes de textes, et particulièrement dans les textes littéraires, nous n'y pensons généralement pas alors que nous savons que le langage conditionne notre manière de percevoir le monde, qu'il ne se réduit pas à son apparence de simple moyen de communication entre les humains, et que l'écrit potentialise une énergie et un pouvoir symbolique indéniables.
 
Toute personne passionnée par la lecture de romans ressent intimement en elle l'agitation animiste des personnages et des paysages décrits.
La Novlangue inventée par George Orwell dans la fiction, ou bien dans la réalité les travaux du philologue Victor Klemperer qui montre comment l'horreur nazie fut rendue possible par une contamination du langage, attestent d'un façonnage de la perception de notre environnement matériel par la transmission de données virales immatérielles.
Cette poussée démiurgique du langage est depuis longtemps étudiée par les kabbalistes, comme l'examine avec clarté le philosophe contemporain spécialiste de la mystique juive Gershom Sholem, dans un petit essai paru récemment : Le Nom de Dieu et la théorie kabbalistique du langage.
Cette intuition est exprimée par des artistes. 
Dans Du théâtre clandestin au théâtre de la mort le metteur en scène polonais Tadeusz Kantor écrit :  "Le principe selon lequel les idées sont déterminées par les conditions historiques et sociales n'exclut pas le fait qu'elles aient également une force autonome de même niveau pour façonner de nouvelles conditions historiques et sociales et, par conséquent, de donner naissance à de nouvelles idées, ce qui indiquerait qu'elles possèdent également leur propre circuit autonome de développement." .

Comme l'écrivait George Steiner dans son essai Réelles présences. Les arts du sens : « la grammaire vit et engendre de nouveaux mondes parce qu'existe le pari sur l'existence de Dieu. ». Assertion que nous pourrions inverser ainsi : parce que nous faisons le pari de l'existence de Dieu notre grammaire vit et engendre de nouveaux mondes.
Alors : pourrait-on considérer certains textes littéraires comme des algorithmes ?
J'ai beaucoup de réflexions et quelques éléments de réponses à ce propos.
Contactez-moi si le sujet vous intéresse pour un article détaillé ou une conférence...
 

jeudi 6 février 2020

Le Livre il est pas mort dis !!!

A lire dans NEON Magazine qui vient de sortir nos réactions à la question : LE LIVRE EST-IL MORT ? 
Lorenzo Soccavo dans NEON MAG 2020
A découvrir dans NEON MAG #75
Vincent Monadé (président du Centre National du Livre), Julien Simon (directeur éditorial), et moi-même sommes d'accord pour dire que le plus important, plus important encore que le livre, c'est la lecture ! 
Comme Vincent Monadé je pense que : "il y aura des lecteurs... tant que l'on continuera d'apprendre la lecture sur ce support ! [le livre imprimé] ". Mais comme je le souligne "il y a une singularité de l'expérience de la lecture d'un texte écrit qu'il faut absolument sauvegarder...". 
Et vous, qu'en pensez-vous ?
   

mercredi 5 février 2020

Vanessa Springora / Gabriel Matzneff - Réalité vs Fiction

Livres_Hebdo_Tribune_Lorenzo_Soccavo
  
Extrait : "... la question se pose je pense de déterminer si ce livre de Vanessa Springora ne serait pas une magnifique étude de cas d’une forme de métalepse ? [...] Les fictions littéraires se heurtent sinon au principe de réalité. Les contes pour enfants comme le témoignage de Vanessa Springora en témoignent. Mais un effet collatéral de l’affaire Matzneff pourrait être justement de nous sensibiliser à la porosité de ce qui serait à concevoir davantage comme une membrane vivante que comme un mur..."
N'hésitez pas à réagir...
    

mardi 4 février 2020

Rencontrer des Personnages de Fiction

Pourrons-nous un jour vraiment discuter avec les personnages des romans que nous lisons ?

   
Oui, peut-être un jour, parce que les technologies de l'intelligence artificielle favorisent le développement de créatures biodigitales qui pourraient faire des personnages de romans des vivants (presque) comme nous.
   
Les personnages de fictions littéraires, parce qu'ils sont généralement des créatures anthropomorphes qui ne vivent pas vraiment sur Terre, sont en toute logique les premiers extraterrestres avec lesquels nous devrions chercher à entrer en contact. Des oeuvres comme, entre autres, Six personnages en quête d'auteur de Pirandello abordent cette question de leur autonomisation. La créativité des auteurs et le pouvoir d'invocation de lectrices et de lecteurs passionnés (qui s'exprime par exemple dans les cosplays) pourraient contribuer à leur manifestation dans le monde physique. Pour Blaise Cendras son personnage de Moravagine aurait veillé sur lui durant la Guerre de 14-18. 
Le phénomène est probablement de l'ordre de celui observé en religion avec les apparitions, ou bien certaines entités spirituelles du Bouddhisme tibétain (tulpas). Mais ce sont probablement les technologies de réalités virtuelles qui vont rendre ce miracle possible avec le développement de créatures biodigitales, comme on en rencontre déjà sur Instagram dans des profils d'influenceuses, ou avec les hologrammes utilisés pour des concerts de stars disparues, ou carrément virtuelles comme dans la pop japonaise. Le rôle des êtres virtuels dans l'industrie du divertissement est appelé à une forte croissance au cours des prochaines années. Le projet NEON, des "êtres artificiels" présentés au Consumer Electronics Show de janvier 2020 à Las Vegas par la filiale de Samsung Star Labs, en atteste. 
Si un marché du clonage numérique se développe avec des vedettes du passé, des personnages historiques ou de jeux vidéo, pourquoi la littérature en resterait-elle absente ? Avoir de vraies conversations avec les grandes figures romanesques de la littérature classique pourrait être une vraie chance pour les générations futures.
Qu'en pensez-vous ?  
J'ai plusieurs exemples concrets qui montrent de réelles avancées dans ce sens.
Contactez-moi si le sujet vous intéresse pour un article détaillé ou une conférence...
   

jeudi 16 janvier 2020

La lecture comme laboratoire du réel...

La lecture sort du bois - Lorenzo Soccavo
La lecture sort du bois ?
Mon texte Des Forêts de Lettres sur le site du Festival des Arts ForeZtiers explore le mystère de la lecture littéraire qui, tout en étant intimement liée au langage pourrait cependant paradoxalement nous délier en partie de ses illusions.

Cette réflexion à partir des postulats suivants : 
- La forêt est un effet de réel du langage ; 
- Une illusion cognitive, (car hors l'entreprise humaine de tout nommer, qu'en serait-il réellement ?) ;
pose plusieurs questions que je pense essentielles : 
- Quel rapport notre vocabulaire entretiendrait-il encore avec ce qui serait la réalité ? 
- Pouvons-nous passer de l’autre côté des représentations que les mots engendrent ? 
- Comment percevrions-nous le monde par le prisme d’une pensée non-verbale, sans la médiation du langage ?
   
L'ambition de ce texte, Des Forêts de Lettres, est à terme de déboucher concrètement sur une expérimentation des effets de réel du langage : "Un effet de réel est, dans un texte littéraire, un élément dont la fonction est de donner au lecteur l’impression que le texte décrit le monde réel", notamment en travaillant la double métaphore du monde comme livre et du livre comme monde, et en lui substituant celle de la lecture qui sort du bois et de la lectrice ou du lecteur qui entre dans la forêt. 
" Que se passe-t-il lorsque la lecture qui sort du bois croise la lectrice ou le lecteur qui entre dans la forêt, et que leurs regards, comme leurs chemins, se croisent eux aussi ? "  
A suivre donc...
 
Les Arts ForeZtiers
Le Festival de création des Arts ForeZtiers explore les expressions artistiques qui témoignent du respect envers la forêt et le Forez, dans la diversité des expressions contemporaines (arts plastiques, danse, photographie, vidéo, film, installations, musique, poésie, etc.). Site web : https://lesartsforeztiers.eu/ 
   

samedi 11 janvier 2020

La Lecture nous sauvera - Extension du domaine de la Prospective

Lorenzo Soccavo dans Futur Hebdo La Lecture nous sauvera...
La Lecture nous sauvera...
Lecture et prospective sont intimement liés.
Mon texte : La Lecture nous sauvera dans la rubrique Construire demain... du numéro 3 de Futur Hebdo - Anthologies Prospectives explore cette synergie dans la perspective de mes travaux sur le potentiel des fictions littéraires comme laboratoires du réel et sur l’autonomisation des lectrices et des lecteurs.

Extraits
" L’affirmation sonne comme une prophétie : « La lecture nous sauvera ! », alors que la prospective n’est ni prédication, ni même prévision.
La prospective est fondamentalement une démarche raisonnable qui à partir d’une connaissance du passé et d’une observation vigilante du présent s’attache à distinguer pour un domaine précis les différentes évolutions probables. Il ne s’agit donc ni de prédire, ni de prévoir, mais d’anticiper et surtout de chercher à construire un avenir meilleur en influençant le contexte et si possible en favorisant l’émergence de nouvelles conditions. [...] Lire peut stimuler notre capacité à nous situer dans l’espace-temps et à nous projeter dans d’autres mondes. 
Cette partie de soi que nous projetons je l’appelle : notre fictionaute. Connaissez-vous le vôtre ?
Densifiée sous la forme invisible de notre fictionaute, cette part ancestrale et toujours aventureuse de l’espèce en nous pourrait nous permettre de développer des facultés métaleptiques, de vivre les métalepses que les contraintes physiques nous empêchent de réaliser : capacités à passer d’un monde à un autre, à emprunter des passages imaginaires, à traverser des espaces mentaux, à accéder à la pensée au-delà de la réflexion. Je définirais une métalepse comme étant le trou d’aiguille par où passe le fil d’une histoire.
Nous devons toujours suivre le fil de l’histoire. Pour cette raison, les enjeux de la lecture dépassent de beaucoup le périmètre de la seule interprofession du livre. Mais en reconnaissant la primauté de la lecture dans notre vision du monde, la prospective se fait méthode de lecture de son devenir, le devenir du monde... "

Contactez-moi directement ou laissez un commentaire à ce post pour plus d'informations... 
 

jeudi 9 janvier 2020

Les posts les plus lus en 2019

https://prospectivedulivre.blogspot.com/
Les posts que vous avez préférés en 2019 sur ce blog de la Prospective et de la Mythanalyse du Livre et de la Lecture sont principalement des publications estivales :