samedi 12 septembre 2009

"Les textes sont désormais trop nombreux pour être tous lus."

Jacqueline Hamesse, de l'Académia belgica (Rome) signe dans Histoire de la lecture dans le monde occidental, la quatrième partie : Le modèle scolastique de la lecture.
Avec le passage des monastères aux universités, on y voit la lecture devenir un exercice intellectuel destiné à acquérir du savoir.
"L'effervescence littéraire à laquelle on assiste dès le XIIe siècle, écrit-elle, a rendu l'accès aux livres plus complexe. Les textes sont désormais trop nombreux pour être tous lus."
Remercions au passage les cisterciens de l'époque qui pensèrent aux documentalistes à venir ;-) Car c'est dès lors l'apparition plus raisonnée que par le passé, des tables des matières, index, des sommaires et des résumés, c'est la publication de glossaires, lexiques, recueils, sommes et encyclopédies...
Mais "Tous les avantages que présentaient ces instruments de travail, nous précise Jacqueline Hamesse, expliquent pour quelle raison la lecture personnelle des oeuvres a eu tendance à disparaître et comment elle fut remplacée, dans de très nombreux cas, par la consultation exclusive d'extraits." Des parallèles avec aujourd'hui ? ;-)
L'histoire de la lecture s'apparente au cycle de l'eau. Du plus profond d'une nappe souterraine sourd en surface un mince filet d'eau. C'est une source. C'est un ruissseau, un torrent, une rivière, c'est un fleuve qui forme delta et se jette dans l'océan.
La lecture en 2009 ne peut se comparer exactement à aucune période du passé, pas plus que les actuelles mutations du livre et de son marché ne peuvent se calquer exactement, ni sur le passage du rouleau au codex, ni sur celui des manuscrits aux imprimés.
Nous ne pouvons lire l'avenir de la lecture dans les lignes de son histoire.
Mais peut-être pouvons-nous y déchiffrer un peu du génome des lectrices et des lecteurs, car, c'est de leurs pratiques nouvelles que seront tissés les textes et les livres de demain...
A suivre...

vendredi 11 septembre 2009

Des idées pour le blog P.L.E. ?

En lançant ce nouveau blog le 1er septembre dernier, alors que l'information off et on line, sur ces questions de l'actualité du livre et de son marché, de l'édition numérique et des nouveaux dispositifs de lecture, est de plus en plus abondante, je vous ai promis de faire de mon mieux pour apporter un autre éclairage.
Et, comme toujours, je tiens à tenir mes promesses.
Si ce blog répond avant tout, je vous l'avais annoncé dès le départ, à la double vocation de vous informer sur mon actualité (publications, conférences, tables rondes...), et d'expliciter mon expertise de prospectiviste du livre et de l'édition auprès des acteurs de l'interprofession, cela ne saurait suffire alors que nous vivons des années capitales pour l'avenir du livre et de la lecture.
Je vous invite donc aujourd'hui à me faire part de vos idées, suggestions, critiques, etc. !
De mon côté j'ai commencé par partager avec vous mes notes et impressions de lecture (pour l'instant de l'ouvrage collectif Histoire de la lecture dans le monde occidental). Je vais continuer.
Je vais aussi, prochainement, inaugurer une série d'entretiens avec des acteurs de l'interprofession du livre, pas des peoples, mais des gens intéressants avec lesquels j'ai parfois le plaisir de déjeuner ou de prendre un verre, et qui, je le sais, ont des choses intéressantes à dire, à nous dire.
Je vous rappelle enfin que nous pouvons également ici partager la partie publique de mon travail de veille : voir dans la colonne de droite les rubriques : "Veille R&D de Lorenzo", "Fil RSS e-books", [vous pouvez également me rejoindre sur Google Reader], le diaporama et les vidéos partagées de nouveaux dispositifs de lecture, les lectures conseillées et "Le Livre du Mois" (cliquez sur la photo de la couverture), et enfin, tout en bas de page, le "Fil Actus". (N.B. : fils RSS, actus et vidéos ne sont pas filtrés et ne reflètent en rien mes opinions personnelles sur les sujets qu'ils abordent.)
Je vous invite également à commenter et noter (peu intéressant / intéressant / passionnant) chaque post de ce blog, et à répondre au sondage : "Les éditeurs sont-ils encore des aventuriers du futur ?" (colonne de droite).
@ bientôt ;-)

jeudi 10 septembre 2009

Lecture extensive vs lecture intensive

Repensant à ma lecture d'hier, de la partie Lire, écrire, interpréter le texte (in Histoire de la lecture dans le monde occidental), je me suis souvenu que l'introduction de l'ouvrage, signée Guglielmo Cavallo et Roger Chartier, remettait en cause cette distinction : lecture extensive / lecture intensive.
Si je résume : il y aurait eu une lecture extensive dès l'antiquité romaine, puis, intensive, avec le développement de la chrétienté, puis, à nouveau extensive, à partir de la seconde moitié du 18e siècle.
Pour caricaturer nous pourrions dire que le lecteur intensif lit et relit la Bible et quelques rares textes religieux, et, le lecteur extensif, tel celui de "la rage de lire", mouvement allemand contemporain de Goethe, se jette lui sur tous les livres avec une curiosité insatiable, comme les romains contemporains d'Ovide.
Pour Cavallo et Chartier : "Discutable, la thèse a été discutée. Nombreux, en effet, sont les lecteurs "extensifs" au temps de la lecture "intensive". Songeons aux lettrés humanistes...".
Et les deux compères de nous rappeler malicieusement "Les deux objets emblématiques de leur [aux lecteurs humanistes] manière de lire [sont] la roue à livres [voir illustrations de ce post] [...] et le cahier de lieux communs, qui reçoit en ses diverses rubriques les citations, informations et observations recueillies par le lecteur."
En 2009 nous sommes certainement dans une période de lecture extensive, où chacun(e) reste libre de pratiques de lectures intensives (en ce qui me concerne La montagne magique, de Thomas Mann ;-)
L'hypertexte a remplacé les roues à livres, et les blogs, tel celui-ci, les cahiers de lieux communs ;-)

mercredi 9 septembre 2009

De la lecture extensive à une lecture intensive

Reprenons le fil d'une Histoire de la lecture dans le monde occidental. La troisième partie : Lire, écrire, interpréter le texte : pratiques monastiques dans le haut Moyen Age, sous la plume (sic ;-) de Malcom Parkes (de l'Université d'Oxford), tranche nettement avec la partie précédente.
Autant la pratique de la lecture, dans le monde romain, apparaissait libre et diversifiée, autant nous apparaît-elle maintenant, dans le monde médiéval, ardue, et réservée à une élite religieuse.
Pas mal d'eau a coulé sous les ponts et, Guglielmo Cavallo avait certes achevé sa partie en nous prévenant bien que : "Le codex était devenu [...] un instrument du passage d'une lecture "extensive" de nombreux textes, diffusés à un public de niveaux divers [...]  à une lecture intensive de textes peu nombreux, avant tout la Bible..."
Cela me pose deux questions :
- En quoi le codex, comme dispositif de lecture, aurait-il pu défavoriser le texte, par rapport au "presque flux" dirais-je, de la lecture sur rouleaux ?
- Pourrions-nous vraiment historiquement imputer à la religion chrétienne une certaine mise sous le boisseau de la lecture de divertissement ?

Je m'attache, vous l'aurez certainement remarqué, en tant que prospectiviste du livre et de l'édition, discipline qui intègre une dimension transhistorique certaine, je m'attache à relier le passé au présent, afin de nous ouvrir, aujourd'hui, des perspectives sur l'avenir.
C'est aux lumières du passé que nous nous dirigeons dans les obscurités de l'à venir...
Dans cette optique, je relève dans le chapitre : Nouvelles techniques de présentation du texte, que : "Le besoin de faciliter l'accès aux textes a entraîné d'importants développements dans les techniques de présentation du texte sur la page...". L'écriture était alors conçue comme : "un moyen d'archiver des informations sur une page". Ne pourrions-nous y voir certains points communs avec le Web ;-)
L'auteur développe également dans cette partie le rôle important des copistes irlandais dans l'élaboration de ce qu'il nomme, une "grammaire de la lisibilité".
Je souhaiterais conclure aujourd'hui par ce dernier extrait : "Nulle part l'histoire ne se répète autant que dans le cas de la lecture, où chaque génération de lecteurs doit passer par les mêmes étapes d'apprentissage que la précédente. Mais certaines générations produisent des lecteurs qui ont de nouvelles exigences, lesquelles stimulent l'invention de nouvelles techniques."
Nous sommes de ces générations là !
A suivre...

mardi 8 septembre 2009

Pourquoi le codex ?

Je poursuis donc l'Histoire de la lecture dans le monde occidental. La deuxième partie traite, sous la plume de Guglielmo Cavallo (de l'Université La Sapienza à Rome) de la question suivante : Du volumen au codex, la lecture dans le monde romain.
Les premiers paragraphes m'étonnent assez, car, à en croire l'auteur, et pourquoi ne pas le croire, le lecteur romain du 2e siècle ressemblait comme un frère aux lecteurs du 20e siècle (je considère, bien entendu, que ceux du 21e acquièrent pour la plupart, en ce moment même, de nouveaux usages). Des lectorats diversifiés donc, bibliomanes, fervents adeptes des bibliothèques et fréquentant déjà les librairies. L'émergence aussi d'un lectorat féminin et d'une lecture de divertissement, pour le simple plaisir du texte lu.

Pour ce qui est de la question centrale, l'auteur est clair : "Le codex à contenu littéraire est une invention romaine." (à dater du 2e siècle).
Il est intéressant de noter qu'il en attribue l'émergence à des facteurs conjoncturels au marché du livre, au "besoin de rapprocher le livre du lecteur, ou, si l'on veut, d'aller au devant de lui [...] Plus facile à fabriquer, le codex permettait de raccourcir les délais et facilitait donc la diffusion du livre...". Globalement le coût d'un codex était nettement inférieur à celui d'un volumen, d'autant que les deux côtés du support pouvaient être écrits, le passage du rouleau au codex allant de pair avec celui du papyrus au parchemin.
Guglielmo Cavallo ne fait aucune mention de cette anecdote d'Alberto Manguel dans son Une histoire de la lecture (Actes Sud), et que, pour ma part, j'aime bien rapporter lors de mes conférences : "d'après Suétone, Jules César fut le premier à plier un rouleau en pages afin de le dépêcher à ses troupes." (Coll. Babel, p. 82).
Notons enfin, le fait est bien connu, que, tout comme les protestants adopteront rapidement l'imprimerie au 16e siècle, les chrétiens adopteront massivement le codex, eux aussi dans le souci d'une plus grande diffusion de leurs écrits.
Si Guglielmo Cavallo ne s'attarde guère à la "protohistoire" entre guillemets, du codex, il signale néanmoins que : "sous la forme primitive des tablettes, des carnets et des cahiers, le codex était connu depuis très longtemps dans le monde romain...".
De mes autres lectures sur ce sujet j'ai retenu que les tablettes de cire, utilisées dès la haute Antiquité (la plus ancienne tablette retrouvée daterait du 14e siècle avant Jésus-Christ), étaient souvent reliées entre elles par des lanières et formaient déjà de petits livres avec une plaquette de couverture. L'interface de lecture du codex est ainsi bien plus ancienne que nous le pensons généralement ;-)
A suivre...

lundi 7 septembre 2009

Critique du dossier Science&Vie : La lecture change, nos cerveaux aussi !

J'ai été contraint d'acheter en kiosque le numéro de septembre du magazine Science & Vie, seulement pour pouvoir y lire leur dossier sur la lecture, lequel, en ligne sur science-et-vie.com est... illisible !
Bonheur des paradoxes qui me permet aujourd'hui cette confrontation critique entre : l'édition papier, l'édition en ligne, et l'émission radio dédiée.

Version papier d'abord
"Nous n'avons jamais autant lu. Et l'écran change profondément notre façon de lire." Soit. Mais, sans vouloir pinailler, j'aurais aimé que ce dossier aille au-delà des constats. Tant les références historiques que la dimension prospective sont floues, et je m'étonne aussi de l'absence de toute bibliographie ou lien Web. Pas la moindre citation, par exemple, du livre de Stanislas Dehaene : Les neurones de la lecture.
Si, pour Thierry Baccino (directeur au Laboratoire des usages en technologies d'informations numériques) : "tout laisse à penser qu'il n'existe pas de processus cérébraux spécifiques à la lecture sur écran comparée à la lecture sur papier", Philippe Testard-Vaillant, le journaliste de Science & Vie en charge de la première partie du dossier, fait bien de signaler l'étude américaine du Semel Institute for Neuroscience and Human Behavior, de l'université de Californie, laquelle étude démontre que la consultation d'informations sur le Web, solliciterait plus particulièrement certaines zones du cortex frontal.
Je retiens ici la pertinence de l'observation, comme quoi, celui que j'appelerai le "Web-lecteur", n'est plus "guidé par les lignes composant le texte [mais doit] construire son chemin de lecture".
Au-delà de ce dossier de vulgarisation pour le grand public, il faudrait je pense bien distinguer les problématiques posées, d'une part, par la lecture sur écran, et, d'autre part, par la lecture hypermédia et les nouvelles pratiques de lecture, issues, non "des écrans" en général, et encore moins des fameux "readers e-paper" en particulier (Cf. la deuxième partie du dossier Science & Vie), mais, bel et bien issues du Web 2.0.
J'espère que nous irons un jour plus loin que les simples constats, et que nous ne concevrons plus les e-books comme, simplement, des machines à afficher des copies numérisées de livres papier, mais, comme des dispositifs pour optimiser la lecture.
Comment lisons-nous ?
Ce dossier de Science & Vie nous le rappelle. Au cours d'une lecture nos yeux perçoivent le texte lu par blocs de quatre lettres en moyenne, et ce, durant des laps de temps de l'ordre de 250 millisecondes. Ce processus s'entraîne lui-même, en repérant dans le même temps les blocs de lettres limitrophes, anticipant ainsi continuellement sur le prochain cliché de 250 millisecondes. Et ainsi de suite...
Il devrait être possible un jour, comme je l'écrivais en avril 2009 dans Réflexions sur la prospective du livre (sur Facebook) : "d’optimiser les nouveaux dispositifs de lecture en fonction des capacités sensorielles des lecteurs humains ? De leurs dispositions naturelles, de vision, de décodage, d’attention, etc. ? Serait-il envisageable de contrôler l’activité neuronale mise en jeu lors de la lecture ? Pourrait-on concevoir des dispositifs de lecture intelligents, capables de s’adapter à différents profils de lecteurs ? D’enrichir l’expérience de lecture ? De remplir des fonctions didactiques, ou bien de leurrer leurs lecteurs par le jeu de simulations et d’illusions les détournant du sens spontanément décodé ? Des livres psychotropes qui provoqueraient des expériences de lecture immersive ? Dans le cadre d’une convergence entre canaux plurimédias, réalité augmentée et intelligence artificielle, les livres de demain pourraient-ils être des dispositifs exocéphales de décodage du monde, des fabriques à sens ? Se pourrait-il que l’évolution des dispositifs de lecture induise à terme des mutations de certaines fonctions cognitives chez les lecteurs ?"
Ces questions se posent, mais, il faudrait certainement être plus modeste en 2009, et commencer par pratiquer le Web design comme une nouvelle typographie appliquée aux e-books. Sortir de ce réflexe absurde du copié-collé, et de vouloir reproduire sur écrans ou sur e-paper les mêmes mises en page que celles des livres et des journaux.
Je relèverai enfin, pour conclure sur ce dossier papier, les réflexions de Charles Tijus sur la prochaine "perte d'habituation au livre papier [qui] rendra probablement difficile la lecture statique, longue, attentive...".
Car, en effet, comme il le souligne justement : "la lecture assistée, interactive et interopérable entre contenus et supports [...] va probablement donner des habitudes que n'offre pas le livre classique."

Version Web ensuite
En l'occurence la lecture sur écran ne serait guère plus fatigante, considérant que le papier glacé du magazine Science & Vie génère nombre de reflets. Bien plus que de l'e-paper par exemple ;-)
Mais, malheureusement, le parti pris de reproduire strictement la mise en page papier, jusqu'à l'effet des pages que l'on tourne, nuit gravement à la lisibilité et à la compréhension des contenus.
La navigation sur ce "reader en ligne" devient périlleuse, la lecture pénible, les bonus perdent l'intérêt qu'ils auraient pu apporter. Aucun enrichissement réel donc, si ce n'est, mais justement pas pour le lecteur (j'en suis un exemple) la nécessité de devoir acheter en kiosque le magazine ;-(
C'est à mon sens un rendez-vous raté, car c'était là un beau challenge de mettre en pratique la complémentarité print/Web pour la presse magazine.
Un simple PDF enrichi, qui soit un complément et non une copie du dossier papier, aurait été plus pertinent et aurait pu appuyer, par l'exemple, les propos tenus par les spécialistes (là, c'est le contraire :-(

Version audio enfin
Incontestablement l'émission partenaire Tout s'explique (animée par Fabienne Chauvière sur France Inter, émission du 28 août 2009, 14H00) est bien plus didactique que le dossier papier.
Thierry Baccino du Lutin-UserLab  y est plus direct sur l'avenir du livre papier comme dispositif de lecture. En disant clairement que : "Le son est un plus. La vidéo est un plus. L'image est un plus... On peut enrichir l'information..." il prône une écriture hypermédia, même s'il met, fort légitimement, en garde contre la "désorientation cognitive" qui peut en découler.
En fait, à mon humble avis, il suffirait simplement qu'auteurs et éditeurs du 21e siècle dépassent la phase du copié-collé, et, hiérarchisent, structurent, réfléchissent a priori les parcours de lecture induits.
A noter, avant de conclure, que Thierry Baccino voit loin ;-) Il évoque clairement des écrans-dispositifs de lecture 3D, puis holographiques, et déclare réfléchir déjà avec son équipe à ce que pourrait être un jour la présentation de livres en 3D.

En conclusion...
Mon classement serait :
- 1 : Version audio
- 2 : Version magazine papier
- 3 : Version Web.
Et vous ?

samedi 5 septembre 2009

Et si les jeux vidéos structuraient une nouvelle pratique de lecture ?

Cette  première partie, La Grèce archaïque et classique : l'invention de la lecture silencieuse, de Jesper Svenbro, dans Histoire de la lecture dans le monde occidental pose également la question des destinataires de l'écrit.
Hier des auditeurs. Aujourd'hui des lecteurs. Et demain quoi ? Qui ?
Demain si l'écrit devient hypermédia... Des spectateurs ? Dans le sens de "Celui, celle qui est témoin d'une chose, quelle qu'elle soit, qui la voit des yeux du corps ou de ceux de l'esprit..." (Littré).  Des joueurs ? Dans le sens de celui "qui prend un divertissement" ou celui qui (se) joue d'une histoire, comme d'un instrument de musique.
Une certaine convergence apparaît aujourd'hui de plus en plus probable, entre écriture hypermédia, 3D, et, jeux et univers dits "virtuels".
Un lointain parallèle serait-il aussi possible, entre ces "objets parlants" de l'époque archaïque (par exemple cette amphore sur laquelle nous pouvons lire : "Kleimachos m'a faite et je suis à lui") et l'Internet embarqué, les objets communicants d'aujourd'hui ?
Je me demande quelle tête aurait fait un Grec devant le lapin Nabaztag ;-)

Pour Jesper Svenbro, le jeu fictif de la représentation théâtrale aurait pu "structurer la nouvelle pratique de la lecture silencieuse [par] l'intériorisation de l'espace théâtral dans l'espace écrit.".
Quand nous plongeons dans la lecture d'un roman, nous lecteurs du 21e siècle, que faisons-nous d'autre sinon d'intérioriser l'espace écrit dans notre imaginaire ?
Peut-être le monde de la littérature et de l'édition devrait-il, en ce début de 3e millénaire, accorder davantage d'attention aux jeux vidéos.
Je le disais déjà en 2007 à Denis Failly dans le cadre des Entretiens du futur : "Les jeux numériques sont par ailleurs en train de faire émerger de véritables capacités narratives dans la jeunesse. Un art de fabriquer en quelque sorte des univers. Art qui n'est pas très éloigné au fond de celui des romanciers..."
A suivre...