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samedi 8 octobre 2016

La Lecture à Voix Haute revient en force

Dans son captivant essai en 1998, "Une histoire de la lecture", Alberto Manguel expose longuement l'antériorité et la primauté de la lecture à voix haute, par rapport à la lecture à voix basse, comme saint Augustin fut surpris de voir son maitre saint Ambroise la pratiquer, ou la lecture silencieuse, intériorisée, qui semble notre lot commun depuis que des machines à enregistrer et à restituer les sons ont envahi notre environnement. 

Je pense également aux travaux de Jesper Svenbro, lorsqu'il évoque l'intériorisation de l'espace théâtral dans l'espace écrit, et le fait que la lecture silencieuse aurait pu être rendue mentalement possible dans la Grèce antique par l'expérience du théâtre.
Aujourd'hui le mouvement inverse semble s'amorcer. Les vibrations du langage parlé vont peut-être nous devenir plus perceptibles dès lors que l'augmentation bionique de nos organes sensoriels et de nos capacités cérébrales de décodage nous rendra plus sensibles au complexe tissage harmonique du vivant. 
Aujourd'hui, alors que de nouvelles formes de conversations émergent des réseaux sociaux, que réalité augmentée et réalités virtuelles, avec ou sans avatars, nous ouvrent de nouvelles perspectives, que la littérature audio se rappelle au souvenir des lecteurs, que les arts numériques et les robots prétendent renouveler l'expérience théâtrale, peut-être pourrions-nous lire dans cette conjonction de signes le déclin de la lecture silencieuse des textes imprimés et la nécessité pour les lecteurs et les lectrices de tracer leur voyage intérieur dans la résonance, dans l'écho de leurs lectures au plus profond d'eux-mêmes.
 
Hybrider la scène la page et l'écran
  
Dans cette perspective il n'est plus extravagant alors de penser que demain des territoires numériques puissent hybrider ce qui jusqu'alors étaient la scène, la page, puis l'écran.
C'est là une des explorations que nous développons sur la plate-forme web 3D immersive avec avatars EVER (acronyme d'Environnement Virtuel pour l'Enseignement et la Recherche) de l'université de Strasbourg.
Outre les différents projets fédérés autour de mon incubateur virtuel d'un MétaCafé littéraire (voir un post précédent : Les nouveaux chemins de l'oralité), notre nouvelle initiative prend une toute autre forme. 
L'objectif, par rapport à mes recherches en futurologie des dispositifs et des pratiques de lectures, est d'explorer le potentiel de la lecture partagée à distance au sein d'environnements simulés (c'est-à-dire, quelque part, fictifs).

Connectez-vous sur http://www.theatre-adret.fr/emission-lire-en-choeur.php

Chaque opus de ma chronique Le Livre Est Ailleurs aborde une facette de la manière dont le langage que nous utilisons tisse le monde que nous percevons, comment les limites de notre langage signifient les limites de notre propre monde (pour paraphraser Wittgenstein) et comment les mondes numériquement simulés peuvent aujourd'hui repousser ces limites.
Vous pouvez découvrir (c'est-à-dire écouter) le pilote de cette expérimentation enregistrée en multiplex sur la plate-forme web 3D de l'université de Strasbourg depuis plusieurs localisations physiques en France et au Québec, les textes lus, dont celui de ma chronique (Alice et le Plat Pays) en suivant ce lien : http://www.theatre-adret.fr/emission-lire-en-choeur.php 

Pour suivre l'actualité de ce projet vous pouvez vous inscrire au groupe Amis du Théâtre de l'Adret sur Facebook.

samedi 17 septembre 2016

DualCorps - Du livre au Cyberespace

Je suis avec intérêt le projet arts-sciences DualCorps lancé aujourd'hui et pour deux semaines non-stop sur un OpenSim.
Pour mes lectrices et lecteurs qui trouveraient cela a priori énigmatique, toutes les précisions sont clairement formulées sur le site compagnon de l’expérience : EUNICE VSG.
 
"Durant deux semaines, les deux auteures [Claire Sistach et Soizic Sanson] vont s’immerger de manière intensive (quotidiennement et sans autre activité) dans OpenSim, afin de vivre uniquement à travers leurs avatars, tous les autres canaux de communication étant coupés (téléphone, mail, etc) et leur seul espace de vie réduit au minimum (un appartement clos chacune).
La particularité : elles auront le même avatar dédoublé, soit deux avatars totalement jumeaux, reliés par la même base de données...

Cette expérience d'immersion intensive dans un monde simulé m'intéresse en effet à plus d'un titre, et d'abord parce qu'elle prend sa source dans un roman : Les Météores, de Michel Tournier (voir sur ce lien...).


Photo prise le 17 septembre 2016 17H48

vendredi 22 juillet 2016

Les nouveaux chemins de l'oralité

La compréhension des phénomènes liés à l'avatarisation des internautes passe, selon moi, par l'exploration de l'inventivité de ces derniers à travailler la langue dans ces espaces nouveaux que sont les territoires numériquement simulés.
La parole, nous le savons, est antérieure à l'écriture, et la lecture à haute voix antérieure à la lecture silencieuse. Je recommande sur ce sujet les belles pages écrites par Alberto Manguel dans son : Une histoire de la lecture (Actes Sud éd.).
 
Car c'est par le langage que se conquiert le monde ! C'est bien là en tout cas la théorie développée par l'historien Yuval Noah Harari, dans son essai Sapiens : Une brève histoire de l'humanité (Albin Michel éd., 2015), où il y explique que c'est ainsi que l'Homo Sapiens se serait imposé sur la planète : "La capacité de créer une réalité imaginaire à partir de mots a permis à de grands nombres d'inconnus de coopérer efficacement.".
Or, quiconque fréquente le Métavers sait bien que là est le problème : la possibilité d'y rassembler un nombre suffisant d'internautes capables d'y coopérer efficacement.
Le développement du cyberespace, comme extension des territoires physiques limités, passe nécessairement par sa colonisation et l'appropriation du virtuel par les mots.
 
Des expériences francophones !
 
Depuis octobre 2015 nous développons plusieurs réalisations expérimentales dans ce sens avec les comédiens du Théâtre de l'Adret (Jacqueline et Jean-Claude Barral), Jenny Bihouise et Anne Cordonnier, pionnières des environnements OpenSimulator, sur la plate-forme EVER (Environnement Virtuel pour l'Enseignement et la Recherche) de l'université de Strasbourg. 
 
Ces réalisations prennent la forme de spectacles accessibles en permanence à tous les internautes francophones (24H/24-7J/7) et sont librement accessibles à tous.
- La première proposition présentait un parcours de théâtre promenade sur les bords de la Saône (voir : Une autre dimension de la réalité augmentée - Du théâtre dans le Web immersif) à partir de textes de l'auteure Ann Rocard.
- La deuxième, un voyage imaginaire dans la pensée de Camille Claudel sur des textes de l'auteur québécois Denis Morin (voir : Lire devient un spectacle permanent).
- La troisième, qui vient juste d'être lancée en avant-première, vous propose une biographie poétique de la chanteuse Barbara, une nouvelle fois sous la plume de Denis Morin :  
BARBARA, Ebène et Ivoire, pour y accéder passez par le site du Théâtre de l'Adret: http://www.theatre-adret.fr/barbara-ebene-et-ivoire.php .
- Une quatrième proposition s'élabore à partir d'un texte de l'écrivain Bertrand Runtz.
 
Ces spectacles expérimentaux sont rattachés au MétaCafé littéraire que je coordonne sur la plate-forme EVER et qui organise régulièrement des rencontres littéraires à distance, permettant à des auteurs et à des lecteurs de se retrouver et d'échanger malgré les milliers de kilomètres physiques qui peuvent les séparer (voir : Lire, est-ce coloniser de nouveaux espaces ?).
Un prototype de librairie 3D, et un d'une MétaBibliothèque universitaire restent également visitables.
Début 2017 nous devrions lancer de nouvelles initiatives autour de la lecture à haute voix.
N'hésitez pas à me contacter pour toutes demandes d'informations ou pour une visite commentée privée de nos réalisations. 

lundi 20 juin 2016

Lire est ce coloniser de nouveaux espaces ?

Retour sur le café littéraire du 19 juin 2016 sur le thème "Et la lecture devint spectacle", en "after" de #CamilleForEver accueilli et toujours présenté sur la plateforme EVER (Environnement Virtuel pour l'Enseignement et la Recherche) de l'université de Strasbourg, avec la retranscription de mes propos d'introduction à l'entretien avec l'auteur québécois Denis Morin, puis la lecture de correspondances de Camille Claudel par le Théâtre de l'Adret :
  
" En mars 2000 lorsque j'ai vu au Salon du livre de Paris qu'une société se lançait avec comme figures de proue Jacques Attali et Erik Orsenna pour commercialiser des tablettes de lecture qui seraient de véritables bibliothèques personnelles, j'ai réalisé que le numérique, qui jusqu'alors ne m'intéressait pas, pouvait apporter quelque chose aux dispositifs et aux pratiques de lecture.
La société s'appelait Cytale. En juillet 2002 elle était en liquidation judiciaire. Mais moi depuis j'ai continué à creuser ce sillon et, les uns après les autres, à dépasser les horizons du livre.
Cherchant à titre personnel sur des chemins de spiritualité et chercheur depuis quelques années en prospective et en futurologie du livre, c'est finalement le nom, le beau nom grave de lecteur que je n'hésiterais pas ce soir à m'apposer pour nommer le corps physique qui véhicule en ce monde l'esprit inconnu qui me questionne ; paraphrasant ainsi maladroitement l'incipit du Bonjour tristesse de Françoise Sagan, peut-être parce que la lecture se double, pour ce que j'en ressens, précisément de ce sentiment de tristesse. Pour moi ce sentiment de tristesse vient de l'incommunicabilité. C'est l'étanchéité apparente des mondes qui en serait la cause.
Ma boîte crânienne renferme une machine biologique qui décode et documente des longueurs d'ondes captées par mes organes sensoriels. Ce que je perçois comme réel n'est ainsi qu'une représentation comme une autre et sans doute parmi une infinité d'autres possibles. La mouche, qui se pose sur l'écran de mon ordinateur alors que j'écris ce texte, m'est contemporaine. Nous coexistons la mouche et moi. Mais nous ne vivons pas dans le même monde.
Cependant me dis-je, capter, décoder puis documenter, qu'est-ce d'autre sinon lire ? Je lis donc. Je lis tout. Et je cherche à lire les fictions littéraires comme je lis le reste, c'est-à-dire avec la même intention de pouvoir y vivre et y communiquer. Cette gageure m’entraîne dans de drôles d'aventures du côté des réalités virtuelles, des théories transhumanistes et des arts numériques, et aussi du Métavers.  
Depuis 2006 une projection pixelisée de mon esprit, mon avatar présent ce soir parmi les vôtres, erre sur des territoires numériques, tel EVER de l'université de Strasbourg qui nous accueille une nouvelle fois.
Depuis décembre 2015 je suis aussi en contact avec un récit que chaque semaine je retranscris fidèlement. Cela raconte l'histoire du voyage intérieur du lecteur de fictions. La chose prend l'apparence d'un livre, d'un book in progress, pour reprendre à son sujet l'expression de Natan Karczmar, et se présente comme un manuel de résistance pour entrer dans les fictions littéraires comme nous entrerions dans des territoires réels, et pour y puiser des forces nouvelles et y trouver des alliés.
Dès lors la question peut en effet se poser du lien entre les mondes parallèles de nos lectures et un espace digital comme celui que nous partageons en ce moment même.
Pour moi la question reste entière. Je vois ici avant tout un espace de médiation, mais une expression aussi peut-être du désir qui hante notre espèce humaine d'explorer sans cesse de nouveaux territoires à nommer et que nous soumettons aussitôt à la grille de lecture de notre langage.
Que sommes-nous, ici, ce soir, en train de coloniser ?
Sommes-nous certains d'y être les seuls habitants, et que les datas et les scripts ne contiennent pas en germes une autre forme de vie ?
Ce point de vue que je cherche à formuler n'est cependant que celui d'un lecteur, et un autre, un point de vue d'auteur comme celui de Denis Morin sera sans doute tout aussi éclairant, et c'est donc en vous remerciant toutes et tous pour votre écoute, que ma première question à Denis sera :
– Cher Denis Morin, c'est à l'auteur du recueil Camille Claudel, la valse des gestes que je m'adresse, quel sens cela a-t-il ou a-t-il progressivement pris pour toi, que de transporter, de voir transfigurer, ici, tes mots, ton texte, ton langage poétique en somme ? "

 

mercredi 8 juin 2016

Rencontre internationale sur La Lecture devient spectacle

 
En after au spectacle #CamilleForEver nous recevrons l'auteur québécois Denis Morin au sein du MétaCafé Littéraire, espace expérimental de médiation du livre et de la lecture que je propose sur la plate-forme web immersive EVER (Environnement Virtuel pour l'Enseignement et la Recherche) de l'université de Strasbourg.
Cette rencontre, avec au programme des lectures d'extraits de la correspondance de Camille Claudel par les comédiens du Théâtre de l'Adret, est donc accessible librement depuis le monde entier. N'ayez pas peur de vous y connecter et de venir nous retrouver le 19 juin à 17H00 (heure française).
 

lundi 11 avril 2016

Le Lecteur et son Double

"Alors que la distinction entre le lecteur, ce qui est lu et la lecture même, s'estompe, voire serait appelée à disparaître avec le développement de technologies d'assistance à l'imaginaire (le corps humain augmenté, nous le verrons, sera un jour doté de prothèses artificielles pour accroître le champ de ses perceptions sensorielles, ainsi que certaines de ses capacités cognitives, mnésiques, et, surtout de visualisations mentales), le premier pas serait ce dédoublement lecteur/liseur.
Là s'engendrerait je pense la première prise de conscience du fictionaute en soi. En effet, distinguer en soi le lecteur du liseur pose d'emblée une symétrie. Et cette symétrie lecteur/liseur, pour artificielle qu'elle soit peut-être, n'en engendre pas moins naturellement une certaine profondeur de champ, laquelle à son tour produit tout aussi naturellement je suppose, une certaine résonance ondulatoire.
Le phénomène est simple : tout d'un seul bloc nous n'aurions aucun recul, aucune prise de distance possible avec nous-mêmes. Se dédoubler virtuellement, se regarder (se réfléchir) dans le miroir d'une fiction, en prenant au sérieux son double, en considérant son reflet comme une expression de soi sur un autre terrain de jeu, lire en faisant « pour de vrai » comme lorsque nous jouions enfants, c'est se donner la possibilité de s'enrichir d'une deuxième ou d'une énième vie, compte tenu que, comme en mécanique quantique, lecteur et liseur, aussi éloignés soient-ils, ne forment toujours fondamentalement qu'une seule et unique entité psychique. [...]
Cela veut dire que quelle que soit la distance qui les sépare sur le plan de la raison, tout ce qui affecte le lecteur dans sa vie ordinaire, comme tout ce qui affecte le liseur dans sa vie fictionnelle, influe immédiatement et sur l'un et sur l'autre.
  

Réaliser cela c'est je pense commencer à prendre conscience des possibilités d’expansion de sa propre conscience, c'est prendre davantage conscience des potentialités les plus intimes et personnelles de notre nature humaine au sein du grand récit de la vie.
Lire ainsi, lire dans cet état de conscience, c'est ne plus lire dans une perspective imposée par l'auteur, ni même tracée par notre volonté personnelle, par un intérêt particulier, mais c'est se positionner sur des trajectoires. A chaque lecture d'un nouveau roman je me positionne sur une trajectoire, comme je prendrais place sur une rampe de lancement. Nous retrouvons évidemment là, dans le liseur en spationaute, notre modèle du fictionaute. [...]

  
Durant des siècles nous avons configuré le livre, comme support, à notre format mental, et nous avons toujours cherché à ramener l’univers entier dans cette boîte de Pandore qu’est tout volume imprimé.
Maintenant nous constatons que les écrans se rapprochent. L'écran de cinéma était à une dizaine de mètres, celui des téléviseurs à quelques mètres, celui des ordinateurs à moins d'un mètre, celui des tablettes et des smartphones à une dizaine de centimètres seulement, et celui des casques de réalité virtuelle à bien moins de dix centimètres. Et demain ? Si l'écran nous est greffé, ne serait-ce qu'à moins quelques microns, nous aurons intérêt à savoir coder, décrypter et hacker, et à être capable de nous reprogrammer. Et comme toute possibilité de le faire dans le monde physique nous aura probablement été enlevée, c'est dans des mondes parallèles et, en partie au moins, fictionnels, que nous pourrons procéder à ces reconfigurations de nos propres systèmes d'exploitation..."
Ce texte est extrait du chapitre 16 du book in progress
LE VOYAGE INTERIEUR DU LECTEUR sur la plateforme Wattpad... Bonnes lectures !

mardi 8 mars 2016

21e siecle - Lire ensemble depuis toute la surface du globe

Je vous invite à venir expérimenter avec nous sur la plateforme web 3D immersive EVER (Environnement Virtuel pour l'Enseignement et la Recherche) de l'université de Strasbourg, la lecture à distance et à plusieurs voix, pour vivre, avec des comédiens professionnels (Théâtre de l'Adret) ce que le web peut aujourd'hui nous apporter de plus positif : un partage et un enrichissement abolissant les distances et les frontières terrestres. Une utopie, oui, que vous pouvez oser : 



vendredi 4 mars 2016

La Transition Numérique - Les Mutants

Dans le cadre du Festival Vidéoformes 2016 j'aurai le plaisir de participer le samedi 19 mars à 10H00 à la Maison de la Culture de Clermont-Ferrand à la table ronde animée par Elise Aspord (docteur en Histoire de l’art, thèse "Art et Intelligence, vie artificielle et robotique", Paris X) et en compagnie de Virginie Pringuet (programmatrice/curator dans le champ des arts médiatiques), et de Hortense Gauthier (créatrice poétique intermédia, avec Philippe Boisnard), autour du thème : Transmedia / crossmedia : une évolution des paradigmes de la représentation des contenus et de leur diffusion.
Vous serez les bienvenus !

samedi 12 décembre 2015

De l'Homo Sapiens au lecteur augmenté...

L'avenir n'est pas déjà écrit et il ne s'agit pas de le révéler, ni de le prédire. Plusieurs devenirs, en l'espèce du livre imprimé et de la lecture, sont possibles. Mais aucun ne surgira ex nihilo. Tous puisent leurs sources dans le passé le plus lointain de l'humanité et s'expriment déjà en germes dans notre quotidien.
Certains sont cependant plus probables que d'autres. C'est celui qui, au regard de mon travail de veille depuis une quinzaine d'années m'apparaît le plus probable, que j'ai donc choisi de développer dans mes recherches : le passage de l'Homo sapiens au Cyber-lecteur, ou lecteur augmenté. Par chance c'est également celui qui m’apparaît le plus souhaitable pour notre avenir.
Ma méthode consiste à structurer et à formuler en mots une projection de tendances fortes et convergentes, dans lesquelles nous pouvons reconnaître que s'y expriment des invariants qui animent depuis des siècles nos rapports à la réalité et aux fictions.

Nous devons je pense prendre conscience que les mutations en gestation dans le secteur, apparemment bien innocent pourtant, du livre, dépassent de beaucoup les simples et habituelles questions matérielles liées aux supports et aux dispositifs.
Probablement même qu'à l'échéance de la fin de ce siècle la problématique ne se posera plus du tout en ces termes, c'est-à-dire ceux où la majorité d'entre nous la pose encore aujourd'hui.
Cela n'a peut-être d'ailleurs aucune importance.
La problématique d'aujourd'hui n'est pas celle qui demain sera résolue.
Dans tous les cas, elle ne le sera pas par rapport à une opposition ou à une complémentarité papier / écran, imprimé / numérique. Car la chose nouvelle qui se prépare, aujourd'hui, est en fait bien plus de l'ordre de l'émergence, d'une part, de nouvelles formes de narration, et, d'autre part, d'univers transfictionnels, et avec des moyens d'accès et de locomotion dans l'imaginaire tels que nous commençons tout juste à pouvoir les deviner (casques de réalité virtuelle, lunettes et/ou lentilles connectées, intelligences artificielles et transferts de mémoires, etc.).

jeudi 3 décembre 2015

Tribune sur la disparition du livre

A lire et à commenter, surtout si vous ne partagez pas mon point de vue, ma Tribune publiée sur Viabooks : LA DISPARITION DU LIVRE EST-ELLE INEVITABLE ?



lundi 23 novembre 2015

La disparition du livre ? Et après ?

Dans le texte titré : La disparition du livre ? Et après ? j'envisage comment l'émergence des technologies immersives va, au cours des prochaines années, modifier en profondeur nos interfaces numériques, ainsi que nos rapports à la fiction, aux narrations, et conséquemment, à la lecture.
Ces technologies immersives concernent en effet directement les interfaces hommes-machines, mais la question essentielle qui se trouve posée est en fait la suivante : la disparition de l'objet livre imprimé, comme interface de lecture, s'inscrit-elle dans cette dématérialisation apparente des supports ? Ou pas ?
Les effets de réel que la lecture de romans imprimés engendre apparaissent indépassables, et nous ne devons pas être dupes non plus des vastes stratégies commerciales qui sont en action derrière ce qui n'est souvent en grande partie qu'un business de l'imaginaire. Cinéma et littérature participent pour beaucoup à une fictionnalisation abusive du monde qui ne pourrait plus se réenchanter que dans une relation massivement consumériste.
Au terme de cette réflexion j'avance, en guise de conclusion provisoire, deux idées.
La première est que nous assisterions actuellement au divorce de la lecture d'avec les pouvoirs de l'écrit.
La seconde, que ce sera demain aux œuvres de rendre visible le livre, et non plus l'inverse.
L'intégralité du texte est en ligne en suivant ce lien...
N'hésitez pas à le commenter, et surtout si vous n'êtes pas d'accord avec mon point de vue !

samedi 17 octobre 2015

A la découverte de nouveaux espaces pour la lecture et l'école

Ma récente conférence du mercredi 14 octobre 2015 au Canopé (réseau de création et d'accompagnement pédagogiques) de l'Académie d'Orléans-Tours, sur le thème : La médiation du livre et de la lecture dans le web immersif - perspectives pour l'enseignement et la formation, a été l'occasion de synthétiser un certain nombre de mes observations et réflexions, à la fois sur la question du web 3D immersif comme espace de médiation de nouvelles pratiques de lecture, et également de son fort potentiel dans le cadre d'activités pédagogiques et créatives.
Belle occasion aussi de présenter rapidement quelques prototypes développés depuis quelques années avec le Collectif i3Dim (l'Incubateur de la 3D immersive) et de réaliser en fin de conférence un court duplex avec la plate-forme EVER (Environnement Virtuel pour l'Enseignement et la Recherche) de l'université de Strasbourg.
Une belle journée à Orléans, avec un auditoire attentif et intéressé :-)

dimanche 11 octobre 2015

Une autre dimension de la réalité augmentée - Du théâtre dans le Web immersif

 
Vendredi 09 octobre 2015 une première francophone a eu lieu sur la plate-forme web immersif EVER (Environnement Virtuel pour l'Enseignement et la Recherche) de l'université de Strasbourg.
Conduite par les animateurs du Collectif i3Dim (Incubateur de la 3D immersive, avec Jenny Bihouise et Lorenzo Soccavo), en collaboration avec les comédiens Jacqueline et Jean-Claude Barral du Théâtre de l'Adret, sur des textes d'Ann Rocard, cette première expérience de théâtre-promenade à distance nous projetant dans un environnement reconstituant péniche, écluse et maison éclusière traditionnelle dans le décor naturel des bords de Saône, a permis d'approfondir comment le web immersif peut enrichir le web (quantitatif) 2.0 et 2D en dépassant ses limites.
  
Ambiances magiques...
 
Apparition de la vouivre alors que nous sommes sur la péniche
 
Une quinzaine d'internautes de plusieurs pays ont ainsi pu partager cette expérience, se pénétrant des histoires racontées tout en pénétrant dans un décor réaliste où, à tout instant, tout demeurait potentiellement de l'ordre du possible.
Les outils de navigation des logiciels libres utilisés pour cette expérimentation (opensimulator) permettent aux utilisateurs une véritable pratique du co-browsing augmenté.
Nous pourrions en l'occurrence parler d'une véritable réalité augmentée, dans le sens où ces outils permettent (à l'instar de l'outil de navigation de Google Earth, par exemple), de décentrer son regard et de démultiplier ses points de vue sur toutes les facettes d'un environnement. Des outils de déplacement et de communication développent encore davantage l'expérience de l'internaute et efface son sentiment de solitude face à l'écran de son ordinateur. 
 
Projections dans la projection ?


Un réalisme envoûtant (Photo Anne Cordonnier - EVER)
Versant prospective de la lecture, ces expériences interrogent la place de la lecture à voix haute dans les territoires numériques, ainsi que la conjugaison de mondes fictionnels, vécue comme une extension de l'imaginaire et un enrichissement des réalités quotidiennes.
Le prochain groupe de 15 personnes est prévu pour le vendredi 23 octobre 2015 (21H00 heure française). Il reste quelques places et d'autres groupes seront prévus ultérieurement.
 
POUR PARTICIPER (initiation et participation à l'expérience gratuites) RENDEZ-VOUS sur le site du Théâtre de l'Adret : http://www.diner-theatre.com/lecture-scenarisee-en-3d.php ...


vendredi 25 septembre 2015

Les Cyber-lectrices sauveront-elles le monde ?

En ces temps de transition il me faudrait peut-être d'abord éclairer la notion de bibliocène et ce qu'elle libérerait comme espace de réflexion par rapport à un anthropocène qui reste contraint dans le carcan idéologique de l'anthropocentrisme triomphant.
Mais peut-être avancerons-nous plus tard sur ce chemin piégé.
Je voudrais juste ici avancer quelques idées sur les possibles impacts du transhumanisme et de la convergence NBIC (Nanotechnologies, Biotechnologies, Intelligence artificielle et neurosciences Cognitives) sur l'émergence de nouvelles voies pour la lecture. 
 
Nous sommes tous habités par un sentiment d'identité profonde, la certitude, la connaissance d'être et de demeurer, depuis notre naissance et au cours des années, la même personne unique bien distincte des autres, des contextes et des environnements multiples dans lesquels nous évoluons, et, dans la mesure de notre volonté, d'être aussi l'auteur original de nos pensées.
Cette conscience de soi est cependant de plus en plus fragilisée par la spectacularisation du monde, sa ludification, l'artificialisation numérique et multimédiatique, avec lesquelles il peut être de plus en plus difficile de différencier clairement ce qui est réellement soi de ce qui est un déguisement ou un uniforme imposés.
De plus en plus les mondes fictionnels, qui nous sont proposés comme des dérivatifs jouant le rôle de soupapes de sécurité, nous objectivent, dans la mesure où nous les objectivons par nos pratiques de lecture.
 
Des Amazones aux Fictionautes...
 
Considérant que la grande majorité des lecteurs de fictions littéraires sont des lectrices, la probabilité qu'elles constituent demain l'élite d'un futur bibliocène est élevée.
Les avancées actuelles dans les secteurs des intelligences artificielles et des réalités virtuelles en 3D, ces simulations informatiques d’environnements imaginaires au sein desquelles les lecteurs pourront s'immerger, élargissent en effet le répertoire des possibles.
Par exemple, pourrions-nous imaginer un jour un catalogue de créatures artificielles pouvant prendre en charge la personnalité du lecteur le temps d'un voyage (d'une lecture) ?
Les recherches en cours, mes observations, mon travail de veille sur le Métavers depuis 2006 et depuis 2000 en prospective du livre, puis au sein du Collectif i3Dim (L'Incubateur 3D immersive) et de la plate-forme EVER (Environnement Virtuel pour l'Enseignement et la Recherche) de l'université de Strasbourg, me forcent à envisager le lecteur du futur comme une créature artificielle voyageant dans les univers parallèles des fictions
Ces créatures-lectrices développeront de nouvelles capacités de perceptions émotionnelles et d'empathie. Elles seront à la fois la projection et en interaction avec les internautes qui les piloteront mentalement à distance depuis le monde "réel". Elles seront aussi, pour leur plus grand enrichissement expérientiel, en interaction avec les avatars fictionnels des univers littéraires qu'elles exploreront.

Envisager cela ne relève pas de la science-fiction. C'est un (modeste et rapide) exercice de futurologie. Face à l'envahissement des fictions et des technologies (de la science et de la fiction finalement) il est aujourd'hui légitime, et même urgent, de se demander en quoi un courant de pensée comme le transhumanisme pourrait, par ses applications pratiques et leurs effets dans la société, percer des portes entre le monde réel et les mondes fictionnels.

vendredi 11 septembre 2015

Futur du livre et livre du futur

Envisager le futur du livre c'est imaginer le livre du futur
Je n'imagine pas le livre du futur comme un dispositif de lecture, mais comme une interface intelligente permettant l'expression de : "la puissance démiurgique de l'imagination humaine quand elle consent à l'immersion fictionnelle" (formulation d'Anne Besson, Constellations - Des mondes fictionnels dans l'imaginaire contemporain, p. 174, CNRS éd., 2015).
L'impératif sera alors de singulariser chaque lecteur de la masse, de la nasse anonyme du lectorat.
Dans l'absolu, un lecteur n'est, ni un acheteur de livres ou d'ebooks, ni le spectateur passif d'un spectacle.
Si livre du futur il y a un jour, il sera alors la conséquence d'une révolution du lectorat. Sans cela il n'y aura pas de futur du livre.
Le livre du futur ne sera pas un livre, mais un moyen de locomotion.
Après plus de quinze ans de veille quotidienne sur ces questions, je pense aujourd'hui que le futur du livre n'est pas numérique.
L'écoute de contes et de légendes, la lecture de romans imprimés, nous font toujours passer de l'autre côté du miroir plus efficacement que les gadgets électroniques.
Dans un environnement numérique, pour que le livre ait un futur, il faut le concevoir comme une fiction, pas comme un produit (c'est ce à quoi s'essayent les nouvelles écritures et le transmédia).
Nous attendons du livre qu'il devienne un catalyseur, qu'il accélère la réaction de la lecture dans l'espace mental du lecteur, notre jaillissement dans l'histoire, bien plus que son surgissement dans notre environnement quotidien.
Nous attendons des technologies du 21e siècle qu'elles nous fassent passer de l'autre côté du miroir, qu'elles nous donnent accès à la puissance des fictions.
 
En 2015 s'intéresser vraiment au futur du livre, c'est envisager comment les technologies émergentes et notamment la Grande convergence NBIC pourraient, non pas nous instrumentaliser, mais nous équiper pour que nous devenions de véritables lecteurs-fictionautes pratiquant la métalepse narrative comme méthode de lecture (Cf. Lire au 21e siècle et au delà...), c'est anticiper la révolution du livre sur le web immersif intégral, c'est prendre conscience de ce qui est à l'œuvre derrière le code du langage (Cf. Cette Chose derrière le Code), c'est ne pas s'accrocher coûte que coûte au réel, mais oser une perspective futurologique (Cf. Ne vous accrochez pas au réel).
Les futurs livres ne devront plus être des écrans, mais des fenêtres.
En 2015, si l'on veut parler décemment du futur du livre, il faut oser rêver le livre du futur !  
 

jeudi 3 septembre 2015

Révolution du livre sur le web immersif intégral

 
A découvrir pour cette rentrée sur Viabooks cet article exclusif qui explique rapidement, sobrement et clairement, comment et en quoi le web immersif peut déjà enrichir la médiation numérique du livre et de la lecture, et ce, pas uniquement avec des librairies ou des bibliothèques 3D, mais aussi, mais surtout, avec des rencontres, des "cafés littéraires", des lectures de théâtre scénarisé avec des comédiens...
 
Et si vous souhaitez participer à l'expérience en cours de lecture théâtrale scénarisée en immersion 3D sur la plate-forme EVER (Environnement Virtuel pour l'Enseignement et la Recherche) de l'université de Strasbourg, inscrivez-vous gratuitement en cliquant ici...

dimanche 23 mars 2014

Séminaire de Celle-les-Bois sur La Renaissance du Livre

Le compte-rendu de la séance inaugurale du séminaire de Celle-les-Bois sur La Renaissance du Livre, qui devrait avoir lieu le 26 janvier 2060, est d'ores et déjà en ligne sur le blog des éditions d'Alexandre Girardot (merci à lui), Long Shu Publishing.
Titré : 26/01/2060 Le Livre-Mentor indispensable compagnon de survie, cet essai, vous l'aurez compris, de futurologie, est prétexte à envisager les probables développements du livre et de la lecture au cours des années 2000-2060, dresser un possible état des lieux en janvier 2060, puis estimer les évolutions à l'horizon 2100.
Qu'en pensez-vous ?
Vos avis, vos commentaires, vos critiques nous intéressent !
Le compte-rendu de cette séance inaugurale est disponible en suivant ce lien, comme vous le remarquerez il comporte de nombreux hyperliens et quelques notes de fin d'article, cela parce que toutes les principales mutations dont il est fait état trouvent leurs origines dans des expériences, des recherches ou des prototypes existants : il s'agit ici d'un exercice de futurologie, pas de science-fiction !
 

vendredi 5 juillet 2013

Pistes de réflexions et perspectives fuyantes pour la prospective du livre

Au mois de juin j’ai eu l’occasion dans le cadre de mon activité de veille d’assister à plusieurs manifestations qui ont pu nourrir ma réflexion.
Les principales étaient :
— Le Colloque Sciences&Fictions à la Gaîté Lyrique, avec le soutien du Labex Arts H2H (Laboratoire d’excellence des Arts et Médiations humaines de l’Université Paris 8), avec comme participants Manuela de BARROS (Philosophe et théoricienne des arts), Pierre CASSOU-NOGUES (Philosophe et agrégé de mathématiques), Stéphane DEGOUTIN (Artiste et théoricien des médias), Ludovic DUCHATEAU (Artiste), Jean-Noel LAFARGUE (Ecrivain et bloggeur, expert en technologies) et Gwenola WAGON (Artiste et chercheuse), et dont l’objectif était d’explorer : « les liens complexes qu’entretiennent les sciences, en tant que créatrices de formes et de mondes, avec la fiction, et les projections imaginaires qu’elles suscitent dans l’art et la littérature, qui elles-mêmes font retour dans le monde scientifique », ce avec une extension sous la forme d’une exposition collective à la Galerie de Roussan (10, rue Jouye-Rouve à Paris).
— Les rencontres du Labo BnF, dont deux s’intéressèrent aux robots, à la robotique et à l’intelligence artificielle, mais durant lesquelles, étrangement et malheureusement, il ne fut guère question ni de livres ni de lecture ( ?).
— Le vernissage à la SCAM (Société civile des auteurs multimédias) de l’œuvre de l’artiste “plasticienne laborantine” Catherine Nyeki : Mimetika (Prix nouvelles écritures 2011). 
— La soutenance d’habilitation à diriger des recherches d’Alexandra Saemmer (enseignante-chercheur à l'Université Paris 8) sur le thème : "Pour une rhétorique de la réception du texte numérique".
— Le Forum Changer d’ère du 05 juin 2013 à la Cité des Sciences et de l’Industrie (Paris) qui ambitionne de s’inscrire dans le sillage du Groupe des Dix.  
— Les journées Futur en Seine au CentQuatre…  
— Enfin, le cycle « Histoire(s) de livre » à la Bibliothèque de l’Arsenal.
 
La voie du rêve…
  
Tout cela pourrait se résumer en une seule phrase : il nous faut déglacer notre rapport à la lecture sans surévaluer le numérique.
Et se décliner ainsi, sous la forme d’une liste de pistes et d’interrogations aux carrefours :
— Quel devenir pour les mots, le langage alphabétique, versus les codes numériques, la contamination algorithmique ? Une ère post-alphabétique, logiquement probable, est-elle imaginable pour nous ?
— Les livres communicants et intelligents, dotés potentiellement d’une “couche” d’intelligence artificielle, pourront être des organes exogènes. Pourront-ils être des satellites cérébraux ? Des moyens de transports au sein des contrées non-matérielles de l’imaginaire, par exemple ?
De nouveaux dispositifs de lecture pourraient être conçus comme des orthèses (appareils destinés à soutenir une fonction déficiente) pour documenter nos environnements de plus en plus complexes.
— Si nous admettons l’hypothèse transhumaniste, des lecteurs pourraient-ils coloniser des fictions ?
— Les nouveaux dispositifs de lecture qui pourraient être mis au point au cours des prochaines décennies nécessiteront-ils une plus grande coopération des lecteurs ? Je pense notamment à une “trêve d’incrédulité” pour véritablement accepter de “vivre en fiction”, de vivre dans une fiction (transmédia) comme s’il s’agissait d’une réalité (et si c’était déjà plus ou moins le cas ?).
— Nous devrions éviter la conception de dispositifs de lecture qui se défendraient des lecteurs et qui ne feraient que s’entre-lire, s’actualiser et s’augmenter entre eux en évitant le rapport aux scripteurs et aux lecteurs humains (problématique M2M)…
— Les brain-readers seront-ils les dispositifs de lecture du troisième millénaire ? Lire les images mentales générées lors de notre lecture (les processus hallucinogènes de la lecture immersive sont-ils proches de ceux de l’activité onirique ?). Quelles passerelles entre les images mentales et les images de synthèse ?
— Nous devrions aussi prendre garde aux dispositifs qui lisent les lecteurs que nous sommes. (De qui, de quoi sommes-nous les livres ?) (De plus en plus souvent j’entends parler de “lecteurs”, non plus pour désigner des humains qui lisent, mais des machines à décoder ceci ou cela !)
— Dans l’hypothèse d’une fin du monde terrestre des lecteurs pourraient-ils émigrer dans un univers inter, ou trans, ou métafictionnel, purement narratif ? Serait-ce alors la première fois ?
— Ne sommes-nous pas manipulés par, d’une part, le fantôme du papier, d’autre part, le fantasme du numérique ? En quoi l’interface du codex serait-elle indépassable ? Qu’allons-nous gagner et qu’allons-nous perdre en articulant nos pratiques de lectures à de nouveaux dispositifs ?
— Peut-on fonder la réflexion stratégique, la R&D des nouveaux dispositifs de lecture sur la notion de page-écran ? Il sera un jour aussi stupide de parler de l’une que de l’autre, tant ces interfaces seront alors dépassées (question des brain-readers, des lunettes ou des lentilles de réalité augmentée…).
— Quelle est déjà la part aujourd’hui dans nos pratiques de lecture numérique de l’influence des lecteurs non-humains qui agissent sur la diffusion des textes, leur circulation jusqu’à nous et leur ordonnancement ?
— Les territoires numériques (digitaux, metaverse…) sont-ils des “hors-soi”, ou, des “en-soi-écran” ?
— Passerons-nous simplement au cours du siècle de la monotonie de l’imprimé à la saturation du numérique (big data) ?
— etc.
 
La fin du rêve…
 
Quels constats tirer de toutes ces pistes de réflexion ?
Il me revient d’abord en mémoire cette déclaration de Geneviève Ferone au cours du Forum Changer d’ère : « Le premier qui bouge est dans une situation sacrificielle. ».
Je constate ensuite que tant les recherches littéraires au sens large, que les arts et notamment les arts numériques, sont plus avancés que les productions éditoriales bridées par les objectifs et les contraintes économiques.
L’interprofession du livre s’est au fil des siècles fortement structurée autour du marché du livre, et non pas en système innovant au service de l’étude de la lecture, son inscription et ses influences sur l’anthropocène.
Aujourd’hui la recherche et l’innovation au service de la lecture viennent des neurobiologistes et des cogniticiens, des designers et des artistes, de certains prospectivistes et de certains philosophes, de pionniers des territoires digitaux, de certains auteurs et de certains lecteurs. C’est pourquoi ma veille prend de plus en plus des chemins buissonniers et fait un grand détour quand elle s’approche de Saint-Germain-des-Prés.

mardi 19 février 2013

Autre côté de l'histoire, autre côté du miroir

Les outils de visualisation dont peuvent aujourd'hui disposer nos imaginaires pour projeter dans le monde leurs propres réalités sont de plus en plus performants et commencent à être utilisés par des créateurs de plus en plus nombreux, bien que les auteurs, au sens traditionnel d'auteurs de l'écrit, d'écrivains, restent en retrait.
 
Notre attention doit cependant être attirée je pense par une nouvelle récente publiée sur le site Avatarlife : Versu de Linden Lab, le livre dont vous êtes le héros à l'ère de l'IA [Intelligence Artificielle].
  
De quoi s'agit-il ?
"des histoires textuelles et conversationnelles dont le déroulement dépend des choix de votre personnage. Rien de bien révolutionnaire a priori, sauf qu’il s’agit d’un moteur social à peu près semblable à celui utilisé pour les Sim 3 qui vient au secours de notre bon vieux livre. [...] On pense immédiatement au fameux « livre dont vous êtes le héros » qui a éveillé certains d’entre nous, si ce n’est à la lecture, à l’interactivité. Dans le cas présent, vous choisissez de contrôler un personnage et c’est un moteur fictionnel intelligent qui va redéfinir l’ensemble des actes des autres protagonistes de l’histoire.".
De là à ce que ces "autres protagonistes de l'histoire" et le(s) lecteurs(s) mêmes soient avatarisés au sein de territoires numériques immersifs ou en réalité augmentée il n'y a qu'un pas, ou quelques pas que pourrait bien franchir Linden Lab dans les prochaines années (pour les néophytes, rappelons qu'il s'agit de la société créatrice du métavers Second Life, d'où découlent nombre de plateformes sous logiciel libre opensimulator).

Les temps et les espaces de la lecture
 
J'ai ainsi eu l'occasion dimanche soir de m'immerger dans une relecture pour adulte du célèbre conte Le petit chaperon rouge sur ce fameux Second Life.
Un parcours en web 3D immersive, que je pourrais qualifier d'installation ou de "parcours post-narratif sonorisé", créé par les artistes de Second Life, Cherry Manga, Alpha Auer, et Soror Nishi.
Ce type de performances s'inscrit dans les perspectives auxquelles nous réfléchissons au sein de mon incubateur web 3D MétaLectures et, entre autres, dans le cadre de son actuel programme à destination des éditeurs pure-players jeunesse.
 
La lecture que fait Daniel Tammet d'Alice au pays des merveilles va dans ce sens. "Le temps, remarque-t-il, ne s'écoule pas partout de la même façon" (à réécouter dans l'émission radio de Camille Juzeau, La bibliothèque scientifique idéale, sur France Inter).
Une fenêtre sur une possible lecture d'Alice au pays des merveilles, à transposer dans nos lectures quotidiennes.
Dans l'imaginaire, dans les rêves, dans nos lectures, le temps et l'espace ne se comportent pas comme dans la construction que notre cerveau et notre mental élaborent à partir des informations limitées de nos cinq sens physiques et du catalogue de nos apprentissages.
La lecture pourrait bien au cours du siècle évoluer sur ces sentiers là.
Les éditeurs devraient suivre certains personnages, comme Alice, comme le Petit Chaperon Rouge...
 
Un autre petit chaperon rouge de l'autre côté de sa propre histoire...
D.R. Illustrations de l'artiste Cherry Manga,
à l'occasion de la performance The other side of the story
Visite libre possible jusqu'au 15 avril 2013 sur la plateforme Second Life
 à l'adresse : The Companion =
N.B. : version pour adultes.