Une réflexion tranchée de Pascal Quignard, qui fait écho à mon travail, alors que de plus en plus d'éditeurs pure-players tendent à produire des livres numériques avec de moins en moins de texte et de plus en plus d'images, de vidéos, d'animations...
"Toute image est à proscrire dans les livres qu'on ouvre et dans la lecture desquels on se plonge -- sinon celle de l'écrit lui-même -- par la simple raison qu'elle se substituerait à la lettre qui s'efforçait de suppléer à son défaut. Il est 1. contradictoire, 2. vain de demander au signe qu'il se transporte dans l'objet à quoi il réfère, car la signification est ce transport même ; c'est par voie de conséquence demander au signe qu'il se répudie comme signe ; c'est astreindre l'écrit à sa mort. L'image coupe l'herbe sous le pied qui est le langage. Montrer l'écrit comme spectacle : s'il apparaît, il s'anéantit ; il commence à être visible ; il cesse d'être lisible [...] Pour reprendre le verbe dont usait Gustave Flaubert, la mise en images "tue" les mots, puisqu'elle prétend se ressaisir de ce qu'ils avaient abstrait dans l'immédiateté continue pour le réintroduire dans l'univers physique."
Extrait de Petits traités I, Pascal Quignard, Folio, VIIe Traité : Sur les rapports que le texte et l'image n'entretiennent pas, pp. 132-133.
N.B. : C'est moi qui souligne.
Dans le contexte du passage de l'édition imprimée à l'édition numérique, la question se pose : et si maintenant le spectacle gagnait aussi le livre, le texte, l'écrit ?
Mais lui de son côté proscrit l'image comme signe. Quid des livres illustrés, des bandes dessinées, et de tout un tas d'autres nouveaux modes de narrations à venir...
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